9180-6 - Érablaies montagnardes et subalpines à Orme de montagne

Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats

Caractéristiques stationnelles

Ce type d’habitat se rencontre aux étages montagnard supérieur et subalpin (de 800 m-1 000 m à 1 600-1 800 m selon la latitude).
Recherche les versants exposés au nord (ou à l’ouest et à l’est) et les ravins.
Les sols sont colluviaux riches en cailloux et en terre fine, à bonne activité biologique.
Les stations sont soumises à des coulées de neige : simple accumulation préférentielle, persistant au printemps ; ou véritable avalanche.
Le poids de la neige exerce une importante contrainte : ployés dans leur jeune âge, les Érables conservent souvent une forte courbure basale ; ils résistent bien aux blessures diverses (cépées) occasionnées par les avalanches qui éliminent le Sapin et l’Épicéa.

Variabilité

Variations d’ordre géographique :
- race vosgienne peu alticole avec quelques espèces acidiclines : Pâturin de Chaix (Poa chaixii), Luzule des bois (Luzula sylvatica) ;
- race jurassienne et des Alpes du nord avec Anthrisque (Anthriscus nitida), Achillée à grandes feuilles (Achillea macrophylla)… ;
- race des Alpes du sud avec Calament à grandes fleurs (Calamintha grandiflora) ;
- race appauvrie du Massif central (Chaudefour) avec l’Érable plane (Acer platanoides).

Variations avec l’altitude :
- forme montagnarde à Frêne commun (Fraxinus excelsior), Érable plane (Acer platanoides), Nivéole (Leucojum vernum)… ;
- forme subalpine dominée par l’Érable sycomore (Acer pseudoplatanus) avec l’Impératoire (Peucedanum ostrithium)… ;

Variations trophiques selon les substrats géologiques et les matériaux qui en découlent (cf. les races décrites ci-dessus).

Physionomie, structure

La strate arborescente est fortement dominée par l’Érable sycomore accompagné de l’Orme de montagne, du Sorbier des oiseleurs. Dans les Alpes, les avalanches sont à l’origine de cépées naturelles. Hêtre, Sapin, Épicéa sont très rares, surtout dans ces stations soumises aux avalanches.
La strate arbustive se compose du Noisetier (Corylus avellana), du Cerisier à grappes (Prunus padus), de l’Alisier nain (Sorbus chamaemespilus).
La strate herbacée est dominée par les hautes herbes : Campanule à feuilles larges (Campanula latifolia), Aconit paniculé (Aconitum paniculatum)…

Confusions possibles

Avec les faciès à Érable sycomore de la hêtraie sommitale subalpine voisine où se rencontrent quelques hautes herbes (Oseille à feuilles de Gouet : Rumex arifolius) installées hors des circuits avalancheux.
Avec les accrus à Érable et Frêne s’installant sur pâturages abandonnés (avec persistance de quelques prairiales).

Dynamique

Spontanée :
Mégaphorbiaie à Laitue des Alpes (Cicerbita alpina), Renoncule à feuilles de Platane (Ranunculus platanifolius), Adénostyle à feuilles d’Alliaire (Adenostyles alliariae)… --> Colonisation par des arbustes : Rosier des Alpes (Rosa pendulina), Camerisier noir (Lonicera nigra) --> Maturation progressive par l’Érable sycomore.

Liée à la gestion :
Taillis liés à une exploitation ancienne pour le bois de feu (Vosges, Jura : là où les avalanches ne sévissent pas !).

Habitats associés ou en contact

Habitats d’éboulis (UE : 8120).
Végétation des fentes de rochers (UE : 8210).
Prairies à hautes herbes ou mégaphorbiaies (UE : 6430).
Hêtraies subalpines à Érable (UE : 9140).
Sapinières-hêtraies diverses.
Pessières sur blocs ou sur lapiaz (UE : 9410).
Aulnaie verte.

Répartition géographique

Massif vosgien, à proximité de la hêtraie sommitale à Érable ou en contrebas.
Haute chaîne du Jura.
Alpes : sur l’ensemble des Alpes externes jusque dans le Mercantour (massif du Cairos).

Valeur écologique et biologique

Type d’habitat peu fréquent sur l’ensemble de son aire ; individus occupant de plus de faibles étendues.
Présence d’espèces rares à l’échelle régionale, présence possible d’espèces protégées (comme la Campanule à feuilles larges : Campanula latifolia)…
Participe à des mosaïques d’habitats du plus grand intérêt.

États de conservation

Futaies irrégulières mélangées.
Cépées ayant une origine naturelle (avalanches) dans les Alpes.
Fruticées de reconstruction.
Mégaphorbiaies dérivant de la destruction ancienne de l’habitat (ex. Chaudefour : massif du Sancy).

Tendances et menaces

Là où l’habitat a été détruit par déboisement autrefois au profit du pâturage, la dynamique lente ramène progressivement à l’érablaie à Orme.
Menaces éventuelles par des aménagements liés aux sports d’hiver.

Potentialités intrinsèques de production

Fertilité médiocre et limitée par de nombreux facteurs :
- l’altitude ;
- l’enneigement important et le gel, leur durée, leur impact (bris de branches, courbure basale) ;
- la réduction de la période de végétation ;
- la régénération difficile des essences.
Sans valeur économique (ou à faible valeur), le peuplement se présente le plus souvent sous forme de taillis, avec des arbres en crosse à la base, peu développés et au tronc tortueux.

Axes de recherche

Poursuivre les investigations et observations sur la compréhension des mécanismes de régénération et de dynamique des érablaies et de leur reconstitution.
L’Érable sycomore fait parfois l’objet d’un usage traditionnel, (massif des Bauges : « argenterie » en bois tourné) : il est intéressant de parvenir à conforter et soutenir au maximum cet usage, garant d’une image locale forte et renforçant la valeur patrimoniale des Érablaies concernées.

Bibliographie

 Bensettiti F., Rameau J.-C. & Chevallier H. (coord.), 2001. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 1 - Habitats forestiers. Volume 1. MATE/MAP/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 339 p. + cédérom. (Source)