3220-1 - Végétations ripicoles herbacées des étages subalpin et montagnard des Alpes

Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats

Caractéristiques stationnelles

Cet habitat se constitue en pionnier sur des systèmes alluviaux jeunes (galets, graviers, sables, plus rarement sur sédiments fins : limons ou argiles) ; les substrats sont très filtrants et pauvres en matière organique. Il se rencontre de l’étage alpin (jusqu’à proximité des glaciers) à l’étage montagnard.
Il s'agit d'un habitat souvent en situation précaire, remis en question par la dynamique fluviale. Il est en effet soumis à une dynamique torrentielle marquée par les crues : les conditions hydriques se caractérisent par une alternance de périodes d’inondation (souvent en saison de végétation avec la fonte des neiges préestivale) et de périodes de dessèchement (avec cependant en général un débit d’été élevé) ; la nappe phréatique permet alors une alimentation des systèmes racinaires.
Remarque : certaines espèces sont capables de coloniser des substrats anthropiques (carrières, gravières…). On en retrouve sur les moraines humides en compagnie d’espèces d’éboulis. Parfois, à moyenne et basse altitude, les espèces peuvent également participer au cortège floristique d’éboulis situés en conditions séchardes.

Variabilité

La variabilité de l'habitat est fonction de l'altitude et de la nature du substrat.
Aux étages alpin et subalpin, on rencontre, sur les moraines glaciaires, les bords des torrents, en zone susceptible d’être inondée (sur sables, graviers et galets), les communautés à Épilobe de Fleischer [Epilobietum fleischeri].
À l'étage montagnard peuvent s'observer :
- sur graviers temporairement et fortement desséchés (sur matériaux riches en calcaire), les communautés à Myricaire d'Allemagne et Chondrille fausse-chondrille [Myricario germanicae-Chondrilletum chondrilloidis] ;
- sur sables fins, sédiments vaseux, en zone de sédimentation, irrégulièrement perturbés (développées secondairement avec les travaux hydrauliques, les barrages), les communautés à Calamagrostide faux-roseau [Calamagrostietum pseudophragmitis].

Physionomie, structure

Il s'agit d'un habitat le plus souvent ouvert (à recouvrement incomplet) dominé par des plantes herbacées et quelques chaméphytes ou arbustes bas. Les espèces sont fréquemment dotées de feuilles étroites, d’un appareil racinaire important, et possèdent des stratégies efficaces de régénération, ce qui leur permet une adaptation aux perturbations (crues).

Confusions possibles

Il n'y a aucune confusion possible localement compte tenu de l’originalité écologique, stationnelle et floristique.

Dynamique

Il s'agit d'un habitat pionnier installé sur les bancs de galets des vallées montagnardes dont l'évolution est directement liée à la dynamique naturelle du cours d'eau. Le maintien de l'habitat est assuré par de violentes crues qui détruisent la partie fixée du sol et sa végétation. Le substrat ainsi rajeuni est réoccupé peu à peu par la variante pionnière.
Si le substrat n'est pas bouleversé par une crue violente, il peut s'enrichir en éléments fins, ce qui conduit à une végétation plus fermée (et à la disparition de l'habitat). Plus rarement des arbustes peuvent se développer ensuite : Saule pourpre (Salix purpurea) et Saule drapé (Salix elaeagnos) ou Myricaire en altitude, Bois-de-Sainte-Lucie (Prunus mahaleb), Cornouiller sanguin (Cornus sanguinea), Noisetier (Corylus avellana), Troène vulgaire (Ligustrum vulgare) à basse altitude.
À basse altitude, si les crues ne sont pas trop violentes, la végétation de l’habitat est colonisée par diverses espèces de prairies et de groupements rudéraux.

Habitats associés ou en contact

Habitats aquatiques des cours d'eau (UE 3260).
Végétation à Myricaire d'allemagne (UE 3230).
Saulaies arbustives à Saule drapé (UE 3240).
Aulnaies blanches ou frênaies-érablaies (UE 91E0*).
Végétations herbacées nitrophiles des vases exondées (Bidentetea tripartitae) (UE 3270).
Prairies de fauche à Trisète jaunâtre (Trisetum flavescens) (UE 6520), à Avoine élevée (Arrhenatherum elatius) (UE 6510).

Répartition géographique

Ces communautés ont été définies dans les Alpes suisses et retrouvées en France où leur aire précise reste à définir.

Valeur écologique et biologique

Ce type d'habitat occupe une très faible superficie et présente par ailleurs une très grande originalité du cortège floristique qui rappelle la végétation des éboulis. Il héberge des plantes rares à l’échelle régionale (Chondrilla chondrilloides, Calamagrostis pseudophragmites…).

États de conservation

États à privilégier :
Les variantes pionnières.

Autres états observables :
Phase avec arbustes en cours d’évolution (à retenir comme habitat à Myricaire, UE 3230, ou habitat à Saule drapé, UE 3240).

Tendances et menaces

Ce type d’habitat est lié strictement au maintien de la dynamique des crues ; il s'agit des premiers groupements disparaissant lorsque le lit du cours d’eau est rectifié ou que son débit diminue.
Il peut donc être menacé par les aménagements hydrauliques modifiant le fonctionnement du cours d’eau :
- barrages hydroélectriques abaissant le niveau de l'eau et privant les torrents de leur dynamique de crues ;
- endiguements des cours d'eau (empierrement des rives…) entraînant localement la disparition de l'habitat ;
- ouvertures et exploitations de gravières.
Les aménagements touristiques peuvent entraîner une perturbation des sites (sports nautiques).
On constate également la disparition fréquente de l'habitat par les processus d’eutrophisation du cours d’eau.

Potentialités intrinsèques de production

Aucune potentialité forestière.

Axes de recherche

Cet habitat est très peu étudié en France. De nouvelles investigations sont nécessaires pour préciser l’aire des différentes communautés et leurs cortèges floristiques locaux.

Fiche du cahier d'habitats (format pdf)
Bibliographie

 Bensettiti F., Gaudillat V. & Haury J. (coord.), 2002. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 3 - Habitats humides. MATE/MAP/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 457 p. + cédérom. (Source)