3220-3 - Végétations ripicoles herbacées des cours d'eau pyrénéens

Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats

Caractéristiques stationnelles

Il s’agit d’une végétation pionnière des grèves et alluvions de granulométrie diverse des ruisseaux et torrents pyrénéens.
Cet habitat se rencontre essentiellement aux étages subalpin et montagnard du versant nord des Pyrénées, parfois aux étages inférieurs dans la zone méditerranéenne (Pyrénées orientales et versant méridional).
Il se développe au niveau des lits mineurs des cours d’eau (notamment sur les plages déposées en rive convexe des méandres, parfois en arrière d’un cordon colonisé par la saulaie arbustive) comme au niveau des zones d’épandage alluvionnaires formées par débordement lors des crues.
Les substrats sont filtrants, souvent mobiles ou meubles, généralement pauvres en matière organique, pouvant être remaniés par la dynamique des cours d’eau.
Les conditions hydriques se caractérisent par des alternances de périodes d’inondation (surtout en période de crues consécutives à la fonte des neiges ou à de fortes précipitations) et de dessèchement superficiel du substrat.

Variabilité

Variations en fonction de l’altitude
Aux étages subalpin et montagnard sur sables, graviers et galets de nature lithologique diverse, des bords ou des lits des torrents : communautés à Fausse-roquette à feuilles de cresson [Erucastro nasturtiifolii-Calamagrostietum pseudophragmitis].
Aux étages subalpin et montagnard des Pyrénées centrales et occidentales, sur dépôts relativement fins riches en carbonate de calcium, se produisant par débordement lors des crues et se desséchant ensuite : phase initiale en station souvent abyssale de l'association à Chardon fausse-carline et Crépide naine (dans son développement optimal, cette association est à rattacher à l'habitat UE 8130, cf. tome « Habitats rocheux »).

Physionomie, structure

Ces communautés herbacées sont souvent très ouvertes (faible recouvrement au sol), dominées par des espèces à appareil racinaire bien développé (ancrage et alimentation hydrominérale). Compte tenu des conditions stationnelles d’alternance régulière de périodes d’inondation et d’exondation, la phénologie de nombreuses espèces est souvent bouleversée.
Cet habitat comporte une majorité d’espèces caractéristiques des habitats d’éboulis situés en amont, ce qui contribue à augmenter leur diversité végétale.

Confusions possibles

En principe, il n’y a pas de confusion possible, compte tenu de l’originalité écologique et stationnelle, et malgré l’enrichissement en espèces des habitats d’éboulis.

Dynamique

Il s’agit d’un habitat pionnier installé sur les bancs de galets et autres alluvions des vallées pyrénéennes.
C’est un habitat azonal permanent si le substrat est périodiquement bouleversé par des crues violentes, sinon l’enrichissement en éléments fins favorise la fermeture de la végétation, notamment par l’installation de graminées.
Des arbustes (Saule drapé, Salix elaeagnos, Saule pourpre, S. purpurea, Saule bicolore, S. bicolor, Nerprun des Alpes, Rhamnus alpina…) ne peuvent s’y développer que si l’habitat n’est pas maintenu par des phases de régression.
La succession dynamique peut être anéantie par une crue violente rajeunissant le milieu, qui sera à nouveau colonisé par la végétation pionnière très ouverte de départ.
Un enrichissement en azote (proximité des reposoirs à bestiaux) peut entraîner la colonisation par des espèces rudérales : Chénopode Bon Henri (Chenopodium bonus-henricus), Rumex (Rumex spp.), Capselle bourse-à-pasteur (Capsella bursa-pastoris), Ortie dioïque (Urtica dioica)…

Habitats associés ou en contact

Habitats aquatiques des cours d’eau (UE 3260).
Végétation à Myricaire d'Allemagne (Myricaria germanica, UE 3230).
Saulaies arbustives à Saule drapé (UE 3240).
Pelouses paturées à Fétuque rouge (Festuca rubra) et Nard raide (Nardus stricta) (UE 6230).
Végétation des pierriers (UE 8110, UE 8130).
Mégaphorbaies (UE 6430).
Hêtraies-sapinières (Cor. 42.1, Cor. 43).

Répartition géographique

Ces communautés endémiques des Pyrénées occupent une superficie souvent très réduite.
Leur aire précise reste à affiner :
- communautés riveraines à Fausse-roquette à feuilles de cresson : Pyrénées ;
- communautés pionnières à Chardon fausse-carline : Pyrénées centro-occidentales.

Valeur écologique et biologique

Il s’agit d’un habitat rare couvrant de très faibles superficies et appartenant au complexe d’habitats rivulaires (interface habitats aquatiques/habitats terrestres) de grande valeur écologique (diversité biologique, réservoir de faune).
Le cortège floristique, d’une grande originalité, est dominé par des espèces des pierriers, souvent en stations abyssales. On y observe, de plus, la présence d’espèces endémiques pyrénéennes : Erucastrum nasturtiifolium subsp. sudrei (l'Érucastre de Sudre), Carduus carlinoides, Cirsium glabrum, Reseda glauca, Veronica ponae…
Les biotopes sont exploités par la faune : Euprocte des Pyrénées (Euproctus asper), Desman des Pyrénées, Chevalier guignette (Actitis hyploleucos), Bergeronnette des ruisseaux (Motacilla cinerea)…
Ils jouent un rôle relatif de fixation des grèves riveraines.

Valeur économique et sociale :
Intérêt pédagogique en raison de la possibilité d’observer de nombreux orophytes fleurissant précocement en stations abyssales.

États de conservation

États à privilégier :
Phase pionnière optimale.

Autres états observables :
Phase en cours d’évolution comportant des arbustes (à retenir comme habitat à Myricaire, UE 3230, ou habitat à Saule drapé, UE 3240).

Tendances et menaces

C’est un habitat très sensible aux modifications des régimes torrentiels dues essentiellement à des causes anthropiques : construction de barrages hydroélectriques et de retenues entravant la dynamique fluviatile naturelle, pollutions diverses des cours d’eau, modifications du profil en long des torrents par endiguements, prélèvements de matériaux (sables, graviers, galets)…

Potentialités intrinsèques de production

Aucune.

Axes de recherche

Des investigations de terrain sont indispensables pour affiner la répartition de l’habitat, sa variabilité écologique et sa caractérisation phytosociologique.
Il est indispensable d’établir les règles préalables à des opérations de restauration et de réhabilitation de l’habitat.

Fiche du cahier d'habitats (format pdf)
Bibliographie

 Bensettiti F., Gaudillat V. & Haury J. (coord.), 2002. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 3 - Habitats humides. MATE/MAP/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 457 p. + cédérom. (Source)