3270-1 - Bidention des rivières et Chenopodion rubri (hors Loire)

Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats

Caractéristiques stationnelles

Il s'agit de formations pionnières constituées d’herbacées annuelles (craignant la concurrence) s’installant sur des sols nitratés, périodiquement inondés, alluviaux. Leur optimum se situe en bordure des cours d’eau et des bras morts, sur alluvions limoneuses, limono-argileuses ou sableuses plus ou moins envasées. Le niveau de l’eau est variable, sans dessèchement complet (hormis en fin de cycle en rivière méditerranéenne).
On retrouve également ce type de végétation en bordure de lacs, d'étangs ou encore dans des conditions plus artificialisées : bords de mares ou d’abreuvoirs piétinés par les animaux, fonds d’étangs temporairement asséchés pour nettoyage et mise en culture. Ces situations ne sont pas à prendre en compte dans le cadre de la directive « Habitats ».

Variabilité

On observe une grande variabilité en fonction de la nature du substrat (granulométrie) et de la richesse en éléments azotés.
Sur sols à dominante limoneuse ou argileuse, communautés du Bidention tripartitae :
- sur vases riches en éléments azotés : communautés à Renouée poivre-d'eau et Bident triparti [Polygono hydropiperis Bidentetum tripartitae], avec la Renouée fluette, la Renouée douce et le Bident penché ;
- sur limons, au niveau des fossés et des berges : communautés à Renouée poivre-d'eau et Bident penché [Polygono hydropiperis-Bidentetum cernuae], avec le Bident triparti, le Lycope d'Europe (Lycopus europaeus) et le Lythrum salicaire (Lythrum salicaria) ;
- au niveau des grèves limoneuses moyennement riches en azote : communautés à Bidents et Vulpin fauve [Bidenti-Alopecuretum aequalis], avec la Renouée poivre-d'eau, le Rumex des marais, la Renoncule scélérate, etc. ;
- sur limons riches en azote et vases restant humides : communautés à Bidents et Renoncule scélérate [Bidenti Ranunculetum scelerati], avec le Vulpin fauve, la Catabrosa aquatique (Catabrosa aquatica) ;
- au niveau des grèves alluviales limoneuses riches en azote : communautés à Bidents et Rumex maritime [Bidenti-Rumicetum maritimi], avec la Renouée poivre-d'eau, la Renoncule scélérate ;
- sur les rives limoneuses des cours d’eau, des bras morts : communautés à Rumex des marais [Rumicetum palustris], avec la Renoncule scélérate, le Chénopode rouge, l'Arroche couchée, le Cresson amphibie (Rorippa amphibia).
Sur sols sableux, parfois envasés, ou limoneux très riches en azote, communautés du Chenopodion rubri :
- sur boues et limons très riches en éléments ammoniacaux : communautés à Chénopode glauque et Chénopode rouge [Chenopodietum glauco-rubri], avec le Chénopode blanc (Chenopodium album), l'Arroche couchée et l'Arroche étalée ;
- sur sables, graviers et vases riches en azote :
en situation basse : communautés à Renouée à feuilles de patience et Chénopode rouge [Polygono brittingeri-Chenopodietum rubri], avec Xanthium albinum subsp. riparium, le Chénopode glauque et l'Arroche couchée,
en situation haute : communautés à Bident feuillu et Moutarde noire [Bidenti frondosae-Brassicetum nigrae], avec l'Iva (Cyclachaena xanthiifolia), la Renouée poivre-d'eau et la Renouée douce.
À ces types de communautés du Chenopodion s'en ajoutent trois autres : les communautés à Chénopode polysperme et Corrigiole des grèves [Chenopodio polyspermi- Corrigioletum littoralis], les communautés à Souchet comestible [Cyperetum esculenti] et les communautés à Xanthium albinum et Chénopode rouge [Xanthio albini-Chenopodietum rubri].

Physionomie, structure

Ces communautés sont constituées surtout d’espèces annuelles, dont les plus communes peuvent atteindre de grandes dimensions compte tenu de la richesse du sol. Le maximum de diversité et de floraison se rencontre en été et au début de l’automne ; le développement de ces végétations est tardif et très rapide. On observe des dimensions très variables des plantes en fonction des conditions de nutrition (par exemple, la Renoncule scélérate peut mesurer de 5 cm à 2 m).

Confusions possibles

Des confusions sont possibles avec des formes eutrophisées, enrichies en espèces annuelles nitrophiles (appartenant notamment aux genres Bidens, Polygonum et Rumex) de communautés des Isoeto duriaei-Juncetea bufonii (UE 3130).

Dynamique

Il s'agit d'une végétation pionnière, sensible à la concurrence, qui, en l'absence de perturbations, fait rapidement place à des roselières, avec ou sans Saules (Salix spp.), pouvant évoluer vers des saulaies. La dynamique fluviale constitue un élément important pour le maintien de l'habitat. Les crues permettent une ouverture du couvert végétal et assurent un apport d'alluvions offrant ainsi des espaces favorables à l'expression de l'habitat. La dynamique naturelle de colonisation du milieu par les espèces vivaces peut également être bloquée par le piétinement (pêcheurs, bétail...). En milieu méditerranéen, c’est la dynamique fluviale qui permet le maintien de ces communautés où l’on trouve néanmoins fréquemment des germinations de Saules.
De nombreuses espèces, pourvues de graines flottantes (les Lampourdes par exemple), peuvent coloniser d’autres espaces favorables. Certaines plantes ont des diaspores capables de conserver très longtemps leur pouvoir germinatif dans la vase ; elles peuvent ainsi apparaître ou réapparaître lors d’assèchements périodiques ou exceptionnels : on parle alors de plantes à éclipses.

Habitats associés ou en contact

Groupements aquatiques des bras morts (UE 3150).
Roselières (Cor. 53.1), prairies à Laiches (Cor. 53.2).
Prairies inondables fauchées (UE 6440, UE 6510).
Prairies à hautes herbes des lisières et de territoires où les actions anthropiques ont cessé (UE 6430).
Saulaies, saulaies-peupleraies, aulnaies-frênaies diverses (UE 91E0*).
Chênaies-ormaies (UE 91F0).
Chênaies pédonculées-frênaies, chênaies pédonculées-charmaies (UE 9160).

Répartition géographique

Cet habitat est largement répandu dans les domaines atlantique et continental aux étages collinéen et montagnard.

Valeur écologique et biologique

Ces végétations sont souvent fugaces et offrent une faible étendue spatiale. Elles sont souvent appauvries floristiquement du fait de la régularisation artificielle du niveau d'eau, et souvent, elles ne subsistent plus que sous forme d'une marge très étroite le long des cours d’eau et des canaux. Ces communautés peuvent héberger des espèces rares et/ou protégées. Par exemple, Potentilla supina, Rumex maritimus, Rumex palustris sont protégées dans certaines régions.

États de conservation

Privilégier les bandes fugaces des cours d’eau.

Tendances et menaces

On observe un appauvrissement ou une disparition de l'habitat lié à la régularisation artificielle du niveau de l’eau. Il en est de même en cas d’empierrement des rives ou de tous travaux conduisant à une réduction du champ d’inondation. C'est également le cas des curages réduisant les zones favorables à la colonisation de ces milieux. Les stations de ce type d’habitat peuvent être envahies par des espèces exotiques qui remettent en cause sa pérennité (notamment les Jussies, Ludwigia peploides et Ludwigia grandiflora).

Potentialités intrinsèques de production

Néant.

Axes de recherche

De nouvelles investigations se révèlent nécessaires pour préciser la diversité des variantes de ce grand type d’habitat et la localisation géographique de celles-ci.

Fiche du cahier d'habitats (format pdf)
Bibliographie

 Bensettiti F., Gaudillat V. & Haury J. (coord.), 2002. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 3 - Habitats humides. MATE/MAP/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 457 p. + cédérom. (Source)