4090-3 - Landes épineuses supraméditerranéennes des corniches et crêtes ventées des Corbières

Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats

Caractéristiques stationnelles

Étage méditerranéo-montagnard (entre 400 et 1 000 m).
Série de végétation supraméditerranéenne du Chêne pubescent.
Expositions nord, nord-ouest, est, sud-est, ouest.
Pente faible à assez raide (1 à 15°).
Végétation soumise directement ou indirectement à des vents violents et asséchants du nord-nord-ouest (tramontane).
Colonise les croupes culminales, les crêtes, les pentes sommitales, les éboulis fixés xériques.
Roches-mères : calcaires compacts.
Sols : renzdines initiales très pierreuses et caillouteuses avec peu de terre fine.
Pacage extensif.

Variabilité

Diversité typologique importante selon les situations géomorphologiques et les secteurs géographiques.

Pelouses des croupes sommitales ou des crêtes soumises directement à la tramontane :
- des « Corbières occidentales » se développant entre 580 et 600 m, en exposition ouest et nord-ouest sur des replats rocheux : pelouse à Buplèvre d’Alaric et Genêt de Villars [Bupleuro alaricensis-Genistetum villarsii] caractérisée localement par le Buplèvre d’Alaric (Bupleurum ranunculoides subsp. telonense var. alaricense), le Genêt de Villars (Genista pulchella subsp. villarsii), la Bugrane striée (Ononis striata) et la Sabline agrégée (Arenaria aggregata);
- des « Corbières orientales » se développant entre 700 et 1 000 m : pelouse à Œillet du Roussillon et Alysson épineux [Diantho brachyanthi-Ptilotrichetum spinosi], caractérisée localement par l’Œillet du Roussillon (Dianthus pungens subsp. ruscinonensis), l’Alysson épineux (Hormatophylla spinosa), le Genêt de Lobel (Genista lobelii) et le Grand Éphèdre (Ephedra major).

Pelouses non soumises directement à la tramontane :
- abritées du vent en exposition nord ou est, entre 450 et 480 m d’altitude sur pente faible à assez faible, se développant dans les clairières de la chênaie pubescente à Buis : pelouse à Fritillaire noire [Fritillarietum pyrenaicae], caractérisée localement par la Fritillaire noire (Fritillaria nigra), la Valériane tubéreuse (Valeriana tuberosa), l’Iris jaunâtre (Iris lutescens);
- des pentes ébouleuses assez raides et xériques vers 500 m d’altitude : pelouse à Ail doré [Allietum moly] caractérisée par l’abondance des géophytes.

Physionomie, structure

Pelouses des crêtes ventées recouvrant faiblement le sol (entre 40 et 60 %), ouvertes, vivaces et dominées par des chaméphytes suffrutescents qui ont ici l’aspect de coussinets plaqués au sol : Genêt de Villars, Hélianthème blanchâtre (Helianthemum oelandicum subsp. incanum), Grand Éphèdre, Œillet du Roussillon, Alysson épineux… ; elles sont souvent piquetées par le Buis. Le groupement le plus thermophile à Œillet du Roussillon et Alysson épineux correspond à une mosaïque entre une pelouse à chaméphytes prostrés et une fruticée basse et très clairiérée à Genêt de Lobel, Buis et quelquefois Genévrier rouge (Juniperus phoenicea) ; dans tous ces types de pelouses, les thérophytes sont absents.
Autres groupements recouvrant presque totalement le sol (entre 80 et 95 %), ayant l’aspect de pelouses assez fermées, dominées par les géophytes tels que l’Asphodèle rameuse (Asphodelus ramosus), le Narcisse à feuilles de jonc (Narcissus assoanus), l’Ail doré (Allium moly), diverses Orchidées et Graminées : Brome dressé (Bromus erectus), Fétuques gr. ovine (Festuca gr. ovina), Brachypode rameux (Brachypodium retusum)…

Confusions possibles

La pelouse à Œillet du Roussillon et Alysson épineux peut être confondue avec la végétation de rochers calcaires des étages méso- et thermo-méditerranéen du Narbonnais et des Corbières (Diantho brachyanthii-Lavateretum maritimae), groupement rupicole caractérisé entre autres espèces par l’Œillet du Roussillon et l’Alysson épineux [Asplenion glandulosi, code UE : 8210].
Les autres pelouses sont suffisamment bien caractérisées pour n’être confondues avec aucun autre groupement.

Dynamique

Spontanée :
Pelouse à Fritillaire noire et pelouse à Ail doré s’inscrivant dans la même série dynamique progressive. Si celles-ci ne sont plus pacagées ou ne sont plus rajeunies par les phénomènes d’érosion hydrique des sols, elles évoluent d’abord vers une fruticée dominée par le Buis (Buxus sempervirens) [Lonicero etruscae-Rhamnenion catharticae, code Corine : 31.89] caractérisée aussi par l’Amélanchier à feuilles ovales (Amelanchier ovalis), le Cytisophylle à feuilles sessiles (Cytisophyllum sessilifolius), le Prunier mahaleb (Prunus mahaleb), la Viorne lantane (Viburnum lantana)…
Si aucune action anthropozoogène ne s’exerce sur cette fruticée, celle-ci est progressivement remplacée par la chênaie pubescente à Buis (Buxo sempervirentis-Quercetum pubescentis) [Quercion pubescenti-sessiliflorae, code Corine : 41.71] caractérisée entre autres espèces par l’Ellébore fétide (Helleborus foetidus), le Daphné lauréole (Daphne laureola), la Tanaisie en corymbe (Tanacetum corymbosum) ainsi que par un cortège d’espèces d’ourlets calcicoles comme le Millepertuis des montagnes (Hypericum montanum), la Digitale jaune (Digitalis lutea), la Campanule à feuilles de pêcher (Campanula persicifolia)…
Pelouses à Buplèvre d’Alaric et Genêt de Villars et à Œillet du Roussillon et Alysson épineux soumises à des conditions écologiques stationnelles beaucoup plus sévères que les précédentes (crêtes ventées), relativement stables dans le temps. Elles peuvent toutefois évoluer vers une fruticée rabougrie à Buis. Dans les hautes Corbières, ce dernier est le seul arbuste qui résiste aux vents violents. Dans les basses Corbières plus chaudes, il peut être accompagné par le Genévrier rouge et le Genêt de Lobel.

Liée à la gestion :
Absence de données.

Habitats associés ou en contact

Garrigues à Romarin officinal (Rosmarinus officinalis) et Lithodore ligneux (Lithodora fruticosa) [Rosmarino officinalis-Lithospermetum fruticosi] sous ses formes à Crapaudine hérissée (Sideritis hirsuta) ou Genévrier rouge (Juniperus phoenicea) [Rosmarinion officinalis, code Corine : 32.4E].
Végétations rupicoles méditerranéennes à Doradille de Pétrarque (Asplenium petrarchae) [Asplenion glandulosi, code UE : 8210].
Chênaies pubescentes méditerranéo-montagnardes à Buis [Buxo sempervirentis-Quercetum pubescentis, Quercion pubescenti-sessiliflorae, code Corine : 41.71].
Pelouses méditerranéo-montagnardes d’ubac à Seslérie élégante [Seslerion elegantissimae, code Corine : 34.712].

Répartition géographique

Pelouse à Buplèvre d’Alaric et Genêt de Villars, pelouse à Fritillaire noire, pelouse à Ail doré : montagne d’Alaric (Aude).
Pelouse à Œillet du Roussillon et Alysson épineux : crêtes aux environ du château de Quéribut et à 3 km à l’est de ce même château, crêtes dans les secteurs de Coustouge, Jonquières, Fontjoucouse et Durban, massif du Pied de Poul (Aude et limite nord des Pyrénées-Orientales).
Groupements à rechercher au niveau de la montagne de Tauch (Aude).

Valeur écologique et biologique

Habitat endémique des Corbières et peut-être même pour certains types (Allietum moly, Fritillarietum pyrenaicae) d’une partie de cette région (montagne d’Alaric).
Types tous extrêmement rares et occupant dans leur station de faibles superficies.
Crêtes ventées des montagnes des Corbières servant de refuge à un contingent important d’espèces méditerranéo-montagnardes dont un certain nombre sont des reliques glaciaires.
Deux espèces légalement protégées au niveau national : Ail doré et Jurinée humble*.
Deux espèces légalement protégées pour la région Languedoc-Roussillon : Grand Éphèdre et Genêt de Lobel.
Trois espèces prioritaires du Livre rouge national (tome 1) : Ail doré, Jurinée humble et Euphorbe de Loiseleur*.
Quatre taxons endémiques du Roussillon ou des Corbières : Buplèvre d’Alaric, Euphorbe du Roussillon, Œillet du Roussillon, Séneçon des Corbières.
* taxons ne figurant pas dans les relevés publiés mais dont la présence est tout à fait probable dans les groupements considérés.

États de conservation

États à privilégier :
Pelouse ouverte piquetée de chaméphytes prostrés se développant au niveau des pentes, des crêtes ou des replats.
Autres états observables :
Pelouse densifiée par le Buis.

Tendances et menaces

Les pelouses qui ne se développent pas au niveau des crêtes ventées (pelouse à Fritillaire noire et Valériane tubéreuse et celle à Ail doré) régressent au profit de la buxaie ou de la chênaie pubescente à Buis. Elles sont donc sérieusement menacées compte tenu de leur faible superficie.

Potentialités intrinsèques de production

L’habitat ne présente pas un intérêt pastoral particulier si ce n’est celui d’offrir à des troupeaux des parcours de plein air pour des animaux ayant par ailleurs une alimentation complète (bovins viande ou caprins lait) ; il est possible également d’y faire pâturer des bêtes à l’entretien (ovins viande).
Les herbacées, dont le Brome dressé, sont appétentes mais sont soumises à la concurrence du Brachypode rameux qui confère à l’habitat un intérêt limité pour le pâturage ; le Brachypode rameux a tendance à lignifier et freine les autres graminées dans leur développement ; les ovins n’en consomment que la partie sommitale (pousse de printemps ou repousse d’automne).

Axes de recherche

Les inventaires phytosociologiques sont donc nettement insuffisants pour décrire correctement toutes les variations et circonscrire précisément leur répartition géographique.
Des recherches floristiques et phytosociologiques complémentaires s’avèrent donc indispensables pour mieux connaître cet habitat.

Fiche du cahier d'habitats (format pdf)
Bibliographie

 Bensettiti F., Boullet V., Chavaudret-Laborie C. & Deniaud J. (coord.), 2005. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 4 - Habitats agropastoraux. Volume 1. MEDD/MAAPAR/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 445 p. + cédérom. (Source)