6170-7 - Pelouses calcicoles orophiles méso-xérophiles des Alpes sur sols peu évolués

Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats

Caractéristiques stationnelles

Étages subalpin supérieur et alpin (2 000-2 700 m).
Pentes moyennes à très accusées (de 20 à 50°), en général caillouteuses, préférentiellement aux expositions les plus chaudes.
Substrat calcaire ou schisto-calcaire.
Sol allant du type rendzine au sol humo-calcaire, à mull carbonaté à calcique (pH neutro-basique à légèrement acidifié, de l’ordre de 6,4 à 7,8).
Forts contrastes microclimatiques, en rapport avec une courte durée d’enneigement.
Souvent soumis à une forte pression de pâturage.

Variabilité

Diversité typologique principalement en rapport avec la distribution géographique :
- dans les Alpes septentrionales : pelouse à Seslérie bleuâtre et Laîche toujours verte [Seslerio caeruleae-Caricetum sempervirentis], avec la Pédiculaire verticillée (Pedicularis verticillata);
- dans les Alpes méridionales : pelouse à Seslérie bleuâtre et Avoine de Seyne [Seslerio caeruleae-Avenetum montanae], avec l’Esparcette des montagnes (Onobrychis montana).

Au sein de ces deux grands types, existence de nombreux faciès, variantes et sous-associations en fonction de la localisation topographique, l’état évolutif (cf. rubrique « Divers états ») et l’altitude. Ainsi, au sein de la pelouse à Seslérie bleuâtre et Avoine de Seyne des Alpes maritimes orientales, différenciation de deux sous-types distincts en rapport avec ce dernier facteur :
- à l’horizon subalpin inférieur (1 700-2 000 m), sous-association plus xérophile à Nerprun nain (Rhamnus pumila) [subass. rhamnetosum pumilae], avec divers autres nanophanérophytes : Daphné des Alpes (Daphne alpina), et chaméphytes : Germandrée des montagnes (Teucrium montanum), Anthyllide des montagnes (Anthyllis montana), etc. ;
- aux horizons subalpin supérieur et alpin inférieur (au-dessus de 2 000 m), sous-association à Edelweiss (Leontopodium alpinum) [subass. leontopodietosum alpini], avec la Dryade à huit pétales (Dryas octopetala).

Physionomie, structure

Pelouses rases, en général très ouvertes (recouvrement compris entre 20 et 60 %), plus rarement fermées (en particulier dans le type septentrional aux expositions les plus fraîches).
Structure caractéristique en bandes gazonnées, formant gradins, en rapport avec le phénomène de solifluxion (mais peu marquée dans le dernier cas évoqué).
Composition floristique diversifiée, à prédominance d’hémicryptophytes (Graminées cespiteuses et Légumineuses), auxquels s’associent divers chaméphytes : Hélianthème alpestre (Helianthemum oelandicum subsp. alpestre) et Hélianthème à grandes fleurs (Helianthemum grandiflorum), Globulaire à feuilles
en cœur (Globularia cordifolia), etc.
Possibilité d’un piquetage, de manière très disséminée, par le Genévrier nain (Juniperus sibirica), surtout dans le type méridional, ainsi que plus occasionnellement par le Cotonéaster à feuilles entières (Cotoneaster integerrimus).

Confusions possibles

Avec les autres types de pelouses calcicoles en gradins également marqués, à des degrés divers, par la Seslérie bleuâtre : -pelouses méso-xérophiles du Drabo aizoidis-Seslerienion caeruleae [code UE : 6170], en divers points de l’ensemble des Alpes, dont celles à Laîche ferme (Carex firma) [Caricetum firmae, code Corine : 36.433] ; -pelouses xéro-thermophiles de l’Avenion sempervirentis et de l’Ononidion cenisiae dans les Alpes méridionales [code UE : 6170].

Dynamique

Spontanée :
Après stabilisation des pentes, évolution potentielle en principe très lente, en général freinée ou contrecarrée par l’érosion et le pâturage.
Tendance au passage progressif, par décalcification et acidification progressives, vers les pelouses des Caricetea curvulae [code Corine : 36.3] :
- pelouse à Fétuque de Haller (Festuca halleri), sous son type à Laîche toujours verte [Festucetum halleri subass. caricetosum sempervirentis, code Corine : 36.342], dans le subalpin supérieur (en dessous de 2 300 m) ;
- pelouse à Laîche courbée, sous son type à Élyne fausse queue de souris (Kobresia myosuroides) [Caricetum curvulae subass. elynetosum myosuroidis, code Corine : 36.341], dans l’alpin.
Évolution s’effectuant le plus souvent par l’intermédiaire des pelouses acidiclines fermées du Caricion ferrugineae [code UE : 6170], en particulier du type à Fétuque violacée (Festuca violacea) et Trèfle de Thal (Trifolium thalii) [Festuco violaceae-Trifolietum thalii, code Corine : 36.414].
Passage plus hypothétique, en tout cas plus rare (à l’occasion de légères dépressions), par la pelouse à Centaurée à une tête (Centaurea uniflora) et Fétuque paniculée (Festuca paniculata) [Centaureo uniflorae-Festucetum spadiceae, code Corine : 36.331].

Liée à la gestion :
Le pâturage, a fortiori un surpâturage éventuel, joue un rôle essentiel dans le blocage de ces processus dynamiques : maintien d’un fort degré d’ouverture, accentuation de la disposition en gradins (type méridional), dégradation des pentes.
En rapport avec le degré d’intensité de ce facteur, caractère plus ou moins permanent de ces pelouses.

Habitats associés ou en contact

Rochers à Potentille caulescente (Potentilla caulescens) [Potentillion caulescentis, code UE : 8210].
Éboulis à Tabouret à feuilles rondes (Noccaea rotundifolia) [Thlaspion rotundifolii, code UE : 8120].
Divers types de pelouses mésophiles plus ou moins fermées, acidiclines [code UE : 6170] et acidiphiles [code Corine : 36.3] (cf. rubrique « Dynamique de la végétation »).
Dans les Alpes méridionales : pelouses xéro-thermophiles de l’Ononidion cenisiae (souvent avec l’Astragale toujours vert, Astragalus sempervirens) et de l’Avenion sempervirentis [code UE : 6170].

Répartition géographique

Ensemble des Alpes calcaires françaises : -de la Haute-Savoie à l’Oisans pour la pelouse à Seslérie bleuâtre et Laîche toujours verte ; -depuis le Dauphiné et le Briançonnais (à partir du col du Lautaret) jusqu’aux Préalpes maritimes et aux Alpes ligures pour la pelouse à Seslérie bleuâtre et Avoine de Seyne.

Valeur écologique et biologique

Pelouses jouant, au plan écologique, un important rôle stabilisateur des pentes (lié à l’abondance en Graminées cespiteuses).
Habitat à composition floristique riche et diversifiée, pouvant abriter, au-delà de certaines espèces à cueillette réglementée (dont l’Edelweiss), divers taxons rares à très rares : Pédiculaire ascendante (Pedicularis ascendens), Koelérie du Mont Cenis (Koeleria cenisia), ou même menacés (Livre rouge national, tome I), compte tenu de leur aire limitée en France : Fétuque circumméditerranéenne (Festuca circummediterranea) localisée à la haute vallée de la Roya dans les Alpes maritimes.
Parmi les espèces caractéristiques de la pelouse à Seslérie bleuâtre et Avoine de Seyne, présence d’une endémique des Alpes sud-occidentales protégée au plan national, l’Hédysarum de Boutigny.

États de conservation

États à privilégier :
Pelouses en état relativement ouvert (recouvrement de 50 à 70 % maximum), susceptible de maintenir le maximum de diversité floristique en évitant le passage progressif à des stades plus mésophiles et acidiclines.
Préservation des stations les plus représentatives, en particulier marquées par la présence de l’Hédysarum des Alpes et surtout, dans les Alpes méridionales, de l’Hédysarum de Boutigny.
Autres états observables :
Divers états intermédiaires avec d’autres types d’habitats, par exemple avec les pelouses plus xériques de l’Ononidion cenisiae [code UE : 6170] dans les Alpes méridionales, sous forme d’un faciès à Astragale toujours vert (Astragalus sempervirens) ou encore représentatifs de stades évolutifs précoces, particulièrement à haute altitude, encore proches des communautés d’éboulis [ex. : stade précurseur à Saule à feuilles de serpolet (Salix serpyllifolia), faciès fragmentaire à Fétuque à quatre fleurs (Festuca quadriflora)].

Tendances et menaces

Type d’habitat semblant avoir acquis une certaine stabilité, hormis les éventuelles attaques ponctuelles de l’érosion, compte tenu de l’atténuation de la pression pastorale dans les zones considérées.
Globalement peu menacé par les activités humaines, à l’exception des zones susceptibles d’être soumises à des aménagements de sports d’hiver (pistes de ski).

Potentialités intrinsèques de production

Ces pelouses s’installent préférentiellement sur les adrets à pente moyenne à très accusée.
Elles sont précoces et démarrent, selon l’altitude, entre la mimai et la mi-juin.
La ressource pastorale disponible varie de 250 à 350 jbp/ha (étage subalpin) et de 150 à 220 jbp/ha (étage alpin).

Axes de recherche

Absence de données.

Fiche du cahier d'habitats (format pdf)
Bibliography

 Bensettiti F., Boullet V., Chavaudret-Laborie C. & Deniaud J. (coord.), 2005. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 4 - Habitats agropastoraux. Volume 1. MEDD/MAAPAR/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 445 p. + cédérom. (Source)