6210-1 - Pelouses des vallées internes ouest-alpines à climat continental de la Durance

Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats

Caractéristiques stationnelles

Étages montagnard et subalpin inférieur (800 à 1700 m).
Pentes variables (de nulle à 40 %).
Principalement aux expositions chaudes.
Substrat riche en bases (calcaires durs, schistes lustrés).
Sol meuble à compact à pH de l’ordre de 7,5.

Variabilité

Diversité typologique principale selon le caractère édaphique :
Sol meuble, sur roches friables et schisteuses, et pente assez forte : pelouse à Herniaire blanchâtre et Chiendent hispide [Herniario incanae-Agropyretum intermedii] avec : Centaurée blanchâtre (Centaurea leucophea), Salsifis à feuilles de crocus (Tragopogon crocifolius), Laitue des vignes (Lactuca viminea), Linaire rampante (Linaria repens), Crupine (Crupina vulgaris);

Sol plus compact : pelouse à Koelérie du Valais et Astragale à calice renflé en vessie [Koelerio vallesianae-Astragaletum vesicariae] avec : Lin à feuilles fines (Linum tenuifolium), Thésium étalé (Thesium divaricatum), Astragale faux-sainfoin (Astragalus onobrychis), Inule des montagnes (Inula montana), Fumana étalé (Fumana procumbens), Liondent crispé (Leontodon crispus), Liondent hérissé (Leontodon hirtus), Sabline rouge (Minuartia rubra) ; deux sous-associations, principalement selon l’altitude :
- essentiellement aux altitudes inférieures à 1000 m : sous-association à Fumana étalé [Koelerio vallesianae-Astragaletum vesicariae fumanetosum procumbentis] ; deux variantes :
variante à Astragale faux-sainfoin (Astragalus onobrychis) ;
variante à Stipe penné (Stipa pennata) ;
- essentiellement aux altitudes supérieures à 1000 m : sous-association à Tunique saxifrage [Koeleria vallesianae-Astragaletum vesicariae tunicetosum saxifragae] avec Laîche luisante (Carex liparocarpos), Sabline rouge, Pâturin élégant (Poa perconcinna) ; une variante :
variante à Stipe capillaire (Stipa capillata), présente en particulier sur les terrasses hautes d’alluvions sèches de la Durance ; composition floristique légèrement appauvrie par rapport à l’association type ; sur sol plus meuble et plus profond ;

Variantes secondaires concernant plus particulièrement la pelouse à Koelérie du Valais et Astragale à calice renflé en vessie :
aux expositions fraîches : sous-association à Plantain intermédiaire [Koelerio vallesianae-Astragaletum vesicariae plantaginetosum mediae] avec Herbe à l’esquinancie (Asperula cynanchica), Véronique en épi (Veronica spicata), Sauge des prés (Salvia pratensis), sur sol assez profond ; faciès d’abandon de culture ;
sur anciennes terrasses alluviales défrichées et pâturées : sous-association à Laîche luisante [Koelerio vallesianae-Astragaletum vesicariae caricetosum liparocarpae] sur sol sablonneux et graveleux.

Physionomie, structure

Pelouse à Koelérie du Valais et Astragale à calice renflé en vessie : pelouses rases à mi-rases, à recouvrement très variable (de 50 % à 100 %) ; fermeture de la pelouse au sein des variantes à Stipes (recouvrement de ces espèces, parfois proche de 100 %).
Pelouse à Herniaire blanchâtre et Chiendent hispide : pelouse rase à haute (jusqu’à un mètre) selon le recouvrement du Chiendent hispide, marquée par la couleur glauque cendrée caractéristique de ce Chiendent.
Large prédominance des hémicryptophytes et des petits chaméphytes ligneux ou sous-ligneux.
Forte présence de thérophytes et de chaméphytes crassulescentes transgressives des pelouses pionnières [Sedetum brigantiacae, Code UE : 6110], au niveau des interstices peu végétalisés de la pelouse.
Densification et augmentation de la taille de la végétation, principalement pour les pelouses à Herniaire blanchâtre et Chiendent hispide, s’installant sur des sols fertiles (anciennes terrasses cultivées, prairies de fauche) avec apparition d’espèces de pelouses rudérales [Onopordetum acanthii et Artemisio absinthii-Agropyrion intermedii, Code Corine : 87.2], avec principalement : Langue de chien (Cynoglossum officinale), Absinthe (Artemisia absinthium), Berteroa blanchâtre (Berteroa incana).
Avec l’abandon des terres, piquetage de la pelouse par des ligneux de landes [Genévrier sabine (Juniperus sabina), Lavande officinale (Lavandula angustifolia)], de fruticées et de fourrés [Églantiers (Rosa sp.), Épine-vinette (Berberis vulgaris), Nerprun des Alpes (Rhamnus alpina), Genévrier thurifère (Juniperus thurifera), Genévrier commun (Juniperus communis)] et des ligneux hauts d’accrus forestiers [Peuplier tremble (Populus tremula)] et de pinèdes [Pin sylvestre (Pinus sylvestris)].
Deux pics principaux de floraison : l’un centré sur le mois de juin et l’autre sur le mois de septembre.

Confusions possibles

Avec les éboulis calcaires thermophiles à Calamagrostide argentée (Achnatherum calamagrostis) et Centranthe à feuilles étroites (Centranthus angustifolius) [Achnathero calamagrostis-Centranthetum angustifolii, Code UE : 8130] en cours de colonisation.
Avec les pelouses mésophiles à mésoxérophiles à Brome dressé (Bromus erectus) [Bromion erecti, Code UE : 6210], en particulier pour la sous-association à Plantain intermédiaire.
Avec les pelouses mésoxérophiles à xérophiles à Bugrane du Mont-Cenis (Ononis cristata) [Ononidion cenisae, Code UE : 4090].
Avec les pelouses rudérales xérophiles à Onopordon à feuilles d’acanthe (Onopordium acanthium) [Onopordetum acanthii, Code Corine : 87.2].
Avec les pelouses rudérales xérophiles à Absinthe et Chiendent hispide [Artemisio absinthii-Agropyrion intermedii, Code Corine : 87.2].
Avec les landes thermoxérophiles à Lavande officinale et Armoise blanche [Lavandulo angustifoliae-Artemisietum albae, Code UE : 4060].

Dynamique

Spontanée :
Dans certaines situations (fortes pentes soumises à des facteurs d’érosions, sols superficiels situés sur dalles rocheuses) et sur de faibles surfaces (de quelques m2 à quelques dizaines de m2), végétation à caractère quasi permanent : pelouse à Koelérie du Valais et Astragale à calice renflé en vessie.
Pour la majorité des pelouses, végétation correspondant à des formations secondaires issues de la déforestation, de l’abandon de terrasses agricoles, de vignes.
Installation en pionnier (sur pentes terreuses mises à nu par un rajeunissement du milieu…), colonisation des éboulis calcaires thermophiles à Calamagrostide argentée et Centranthe à feuilles étroites [Achnathero calamagrostis-Centranthetum angustifolii, Code UE : 8130], des pelouses pionnières à Orpins et Joubarbes [Sedetum brigantiacae, Code UE : 6110] et des anciennes terrasses cultivées suite à la déprise agricole.
Évolution de la végétation beaucoup plus rapide sur les terres abandonnées ; principales étapes dynamiques : piquetage arbustif et/ou arboré [précédé dans les situations les plus mésophiles par une densification de la végétation par colonisation et extension du Brachypode rupestre (Brachypodium rupestre)] pouvant conduire aux :
- landes thermoxérophiles à Genévrier sabine [Pino sylvestris-Juniperetalia sabinae, Code UE : 4060] ;
- fourrés thermoxérophiles à Épine-vinette et Prunier de Briançon (Prunus brigantina) [Berberido vulgaris-Prunetum brigantiacae, Code Corine : 31.81251] ;
- fourrés thermomésophiles à Amélanchier (Amelanchier ovalis) et Cotoneaster [Cotoneastro-Amelanchieretum ovalii, Code Corine : 31.8123), avec en particulier le Cotoneaster de l’Atlas (Cotoneaster atlanticus) ;
- puis aux pinèdes thermoxérophiles à Pin sylvestre et Bugranes (Ononis sp.) [Ononido rotundifolii-Pinion sylvestris, Code UE : 9430].

Liée à la gestion :
Pâturage pouvant entraîner au niveau des pelouses à Koelérie du Valais et Astragale à calice renflé en vessie des faciès à Stipe capillaire (plante délaissée par les troupeaux), voire (en cas de forte charge pastorale) l’installation de plantes nitrophiles des pelouses rudérales à Onopordon à feuilles d’acanthe [Onopordetum acanthii, Code Corine : 87.2] et des pelouses rudérales à Absinthe et Chiendent hispide [Artemisio absinthii-Agropyrion intermedii, Code Corine. : 87.2].

Habitats associés ou en contact

Falaises calcaires à Potentille à tiges courtes (Potentilla caulescens) [Potentillion caulescentis, Code UE : 8115] ; éboulis calcaires thermophiles à Calamagrostide argentée et Centranthe à feuilles étroites [Achnathero calamagrostis-Centranthetum angustifolii, Code UE : 8130].
Pelouses pionnières à Orpins et Joubarbes [Sedetum brigantiacae, Code UE : 6110].
Pelouses rudérales xérophiles à Absinthe et Chiendent hispide [Artemisio absinthii-Agropyrion intermedii, Code Corine : 87.2].
Pelouses rudérales xérophiles à Onopordon à feuilles d’acanthe [Onopordetum acanthii, Code Corine : 87.2].
Pelouses mésophiles à mésoxérophiles à Brome dressé [Bromion erecti, Code UE : 6210].
Landes thermoxérophiles à Lavande officinale et Armoise blanche [Lavandulo angustifoliae-Artemisietum albae, Code UE : 4060].
Landes thermoxérophiles à Astragale queue de renard et Genévrier sabine [Astragalo alopecuri-Juniperetum sabinae, Code UE : 4060].
Fourrés thermomésophiles à Amélanchier (Amelanchier ovalis) et Cotoneaster [Cotoneastro-Amelanchieretum ovalii, Code Corine : 31.8123).
Fourrés thermoxérophiles à Épine-vinette et Prunier de Briançon [Berberido vulgaris-Prunetum brigantiacae, Code Corine : 31.81251].
Accrus forestiers à Merisier à grappes (Prunus padus) et Peuplier tremble [Pruno padi-Populetum tremulae, Code Corine : 31.8].
Pinèdes thermoxérophiles à Pin sylvestre et Bugranes [Ononido rotundifoliae-Pinion sylvestris, Code UE : 9430].

Répartition géographique

Pelouse à Herniaire blanchâtre et Chiendent hispide : vallée de la Durance, d’Embrun à l’Argentière-la-Bessée ; vallée de la Guisane, en aval de Monétier-les-Bains (Hautes-Alpes).
Pelouse à Koelérie du Valais et Astragale à calice renflé en vessie : vallée de la Durance, d’Embrun à l’Argentière-la-Bessée ; vallées affluentes de la Durance : vallées de l’Onde, du Fournel, de la Biaysse (Hautes-Alpes).

Valeur écologique et biologique

Pelouses d’affinité orientale en limite d’aire de répartition. Très forte richesse floristique et entomologique. Une espèce protégée au niveau national : Astragale queue de
renard (Astragalus alopecurus).
Une espèce protégée au niveau régional (PACA) : Stipe capillaire x penné (Stipa capillata x pennata). Une espèce inscrite au Livre rouge national (Tome I) : Astragale
queue de renard. Trois espèces inscrites au Livre rouge national (Tome II) : Astragale d’Autriche, Fétuque cendrée, Odontite glutineux.

États de conservation

États à privilégier :
Pelouses rases à mi-rases, ouvertes, à tapis végétal plus ou moins lacunaire (en mosaïque avec des surfaces de fourrés, de landes et de forêts).
Autres états observables :
Pelouses rases pâturées par ovins.
Pelouses rases pâturées par bovins.

Tendances et menaces

Suite à l’abandon pastoral de certains secteurs, réduction des surfaces de pelouses liée à l’embrousaillement et au reboisement naturel des vallée.
Sur certains autres secteurs soumis à une intensification du pâturage ovin, dégradation des pelouses et érosion des sols.
Exploitation de la roche (carrières) susceptible de détruire des pelouses (en particulier, les pelouses à caractère subpermanent sur dalles et éperons rocheux).
Extension des zones urbanisées.
Boisements de Pins noirs (Pinus nigra).

Potentialités intrinsèques de production

Pelouses sèches faisant partie des meilleurs parcours de la zone préalpine ; troupeaux locaux et/ou transhumants (ovins, bovins, caprins, équins.
Pelouses peu élevées caractérisées par un équilibre intéressant de la strate herbacée en espèces vivaces (Brome dressé, Koélérie du Valais) et annuelles. La présence de légumineuses (Luzerne, Anthyllide, Astragale...) dans ces pelouses enrichit leur valeur pastorale. La ressource fourragère varie cependant chaque année suivant les conditions climatiques.
Ressource pastorale de très bonne qualité au printemps et en automne : croissance de l’herbe tardive et assez lente, qui permet un pâturage de fin mai à début juillet ; le dessèchement progressif de l’herbe empêche tout pâturage en plein été. Si les pluies de fin d’été sont suffisantes, la repousse d’automne est de très bonne qualité et permet un nouveau passage en octobre-novembre.

Axes de recherche

Pelouses encore peu étudiées, importantes lacunes sur leur répartition géographique et leur variation écologique ; mettre en place des protocoles de suivi pluriannuels de l’impact des mesures de gestion sur le fonctionnement de l’habitat (évolution quantitative et qualitative des pelouses, impact sur la biodiversité).

Fiche du cahier d'habitats (format pdf)
Bibliographie

 Bensettiti F., Boullet V., Chavaudret-Laborie C. & Deniaud J. (coord.), 2005. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 4 - Habitats agropastoraux. Volume 2. MEDD/MAAPAR/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 487 p. + cédérom. (Source)