Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats
Étages supraméditerranéen, montagnard et subalpin inférieur. Éléments fins, pouvant être recouvert par une couche d’épaisseur très variable, pouvant atteindre un mètre, d’éléments moyens et grossiers (jusqu’à 20-30 cm de diamètre).
Principalement aux expositions chaudes (sud). Pentes souvent fortes (30-40 %).
Mobilité plus ou moins importante des éléments selon le degré de la pente et de colonisation par la végétation.
pH de la terre fine de l’ordre de 7,5-8,5.
Diversité typologique principale en relation avec la localisation géographique.
Préalpes du sud : éboulis à Calamagrostide argentée et Centranthe à feuilles étroites [Achnathero calamagrostidis-Centranthetum angustifolii]. Cet habitat montre une bonne homogénéité floristique : les espèces caractéristiques sont pour la plupart présentes sur l’ensemble de l’aire de répartition et tolèrent une grande amplitude altitudinale. Il existe néanmoins une variabilité reposant sur plusieurs facteurs (dont certaines formes mériteraient certainement d’être élevées au rang d’association).
Variations géographiques : différentes races peuvent être évoquées mais correspondent en réalité à des modifications progressives de la végétation selon les axes est-ouest et nord-sud. Les aires de répartition indiquées pour les différentes races sont donc à nuancer :
- race des bassins supérieurs du Var et de la Tinée, avec des stations isolées jusqu’au bassin de l’Ubaye (vallon du Bachelard), avec Fétuque dimorphe (Festuca dimorpha) ;
- races de la partie méridionale des Alpes-de-Haute-Provence et des Alpes-Maritimes ; deux races dépourvues de Centranthe à feuilles étroites peuvent être distinguées : race de la partie supérieure de l’étage méditerranéen jusqu’à 800 m, avec Céphalaire à fleurs blanches (Cephalaria leucantha) ; race de caractère supraméditerranéen, avec la Germandrée luisante (Teucrium lucidum) ;
- race de la vallée de la Durance, du Dévoluy (Hautes-Alpes), très certainement présent dans les départements limitrophes, avec la Scabieuse à feuilles de graminée (Lomelosia graminifolia).
Variations altitudinales : le groupement est de plus en plus fragmentaire avec l’élévation en altitude. Il s’appauvrit en Calamagrostide argentée et s’enrichit en espèces subalpines et alpines, avec : Trisète à feuilles distiques (Trisetum disticho- phyllum), Athamanthe de Crète (Athamantha cretensis), Avoine des montagnes (Helictotrichon sedenense).
Variations hydriques : dans les stations plus humides : forme à Pas d’âne (Tussilago farfara) ;
Variations édaphiques : sur substrats marneux principalement composés d’éléments fins, forme à Bugrane à feuilles rondes (Ononis rotundifolia), Bugrane ligneuse (Ononis fruticosa), Bugrane natrix (Ononis natrix), Fausse roquette à feuilles de cresson (Erucastrum nasturtiifolium).
Bourgogne : éboulis à Centranthe à feuilles étroites et Ibéris de Durand [Centrantho angustifolii-Iberidetum durandi], avec en plus : Laser de France (Laserpitium gallicum), Galium de Fleurot (Galium fleurotii), Scutellaire des Alpes (Scutellaria alpina), Silène des glariers (Silene uniflora subsp. glaerosa). Se rencontre une forme fragmentaire, appauvrie de cette communauté, dans des éboulis à éléments grossiers, avec : Germandrée petit-chêne (Teucrium chamaedrys), Centranthe à feuilles étroites, Dompte-venin (Vincetoxicum hirundinaria), Rosier à feuilles de Pimprenelle (Rosa pimpinellifolia), Mélitte à feuilles de mélisse (Melittis melissophyllum).
Le degré de recouvrement est de l’ordre de 10 à 40 %.
La physionomie est dominée par les touffes de la Calamagrostide argentée et des plantes de grande taille : Centranthe à feuilles étroites, Laser de France pour l’éboulis à Calamagrostide argentée et Centranthe à feuilles étroites, et par les taches mauves (au printemps) de l’Ibéris de Durand.
Les espèces se développant dans ces pierriers mobiles sont pour la plupart des lithophytes migrateurs, ascendants et recouvreurs. Leurs adaptations (stolons hypogés, rejets s’étalant à la surface du pierrier…) concourent à la fixation des pierriers et à l’installation de la pelouse (cf. chapitre « Dynamique de la végétation »). La diminution de la mobilité des pierriers permet à des espèces plus ubiquistes de se développer : Gaillet oblique (Galium obliquum), Calament népéta (Calamintha nepeta), Céphalaire à fleurs blanches.
Avec les éboulis calcaires à éléments fins, des situations fraîches du Petasition paradoxi [Code UE : 8130, Code Corine : 61.231], en particulier pour la forme à Pas d’âne des stations humides de l’éboulis à Calamagrostide argentée.
Avec les éboulis calcaires à éléments moyens à Tabouret à feuilles rondes [Thlaspietum rotundifolii ; Code UE : 8120, Code Corine : 61.22] à l’étage subalpin inférieur.
Avec les éboulis du Pimpinello tragii-Gouffeion arenarioidis (Code Corine : 61.32) en région méditerranéenne.
Avec les éboulis à Ibéris de Contejean (Iberis linifolia subsp. intermedia ; incluant Iberis contejanii) [Iberidetum intermediae fo. contejanii, Stipion calamagrostidis ; Code UE : 8130, Code Corine : 61.31] localisé au Jura.
Au niveau de l’éboulis à Calamagrostide argentée et Centranthe à feuilles étroites :
Après fixation de l’éboulis, la végétation peut évoluer vers des habitats de pelouses méso- à xéro-thermophiles, avec principalement :
- pelouses des Alpes internes du Stipo capillatae-Poion carniolicae [Code UE : 6270, Code Corine : 34.314] aux étages supraméditerranéen et montagnard,
- pelouses à Brachypode de Phoenicie (Brachypodium phoeni- coides) (Code Corine : 34.36) à l’étage supraméditerranéen,
- pelouses de l’Ononidion cenisiae [Code UE : 4090, Code Corine : 36.432] aux étages (montagnards) subalpins,
- pelouses du Seslerion caeruleae [Code UE : 6170, Code Corine : 36.43] aux étages (montagnards) subalpins ;
Passage possible vers des landes et des fourrés méso- à xéro- thermophiles, avec principalement :
- landes des Alpes internes des Pino sylvestris-Juniperetalia sabinae [Code UE : 4060, Code Corine : 31.432],
- landes du Lavandulo angustifoliae-Genistion cinereae [Code Corine : 32.62],
- fourrés du Berberidion vulgaris [Code UE : 5110, Code Corine : 31.82] ;
Evolution ultime possible vers des forêts méso- à xéro-thermo- philes, avec principalement :
- pinèdes des Alpes internes de l’Ononido rotundifoliae-Pinion sylvestris [Code UE : 9430, Code Corine : 42.4 et 42.53],
- chênaies supraméditerranéennes du Quercion pubescentis- sessiliflorae. [Code Corine : 41.71] ;
- chênaies méditerranéennes du Quercion ilicis. [Code Corine : 41.714].
Au niveau de l’éboulis à Centranthe à feuilles étroites et Ibéris de Durand :
- la fixation de l’éboulis conduit le plus souvent aux pelouses à Seslérie bleutée (Sesleria caerulea) et Anthyllide des montagnes (Anthyllis montana) [Seslerio albicantis-Anthyllidetum montanae, Seslerio albicantis-Xerobromenion erecti ; Code UE : 6210, Code Corine : 34.332] ;
- possibilité d’évolution vers des chênaies supraméditerranéennes du Quercion pubescentis-sessiliflorae [Code Corine : 41.71].
Habitats évoqués au chapitre « Dynamique de la végétation », auxquels il est possible de rajouter :
- falaises calcaires du Potentillion caulescentis [Code UE : 8110, Code Corine : 62.15] ;
- pelouses mésophiles du Bromion erecti [Code UE : 6210, Code Corine : 34.322] ;
- alluvions caillouteuses de l’Epilobion fleischeri [Code UE : 3220, Code Corine : 24.221].
Éboulis à Calamagrostide argentée et Centranthe à feuilles étroites : présent dans la majeure partie des Alpes occidentales et remonte jusque dans le Jura méridional.
Éboulis à Centranthe à feuilles étroites et Ibéris de Durand : en Bourgogne sur la côte dijonaise (de Sainte-Foy à Vougeot).
Cet habitat possède deux espèces endémiques des Alpes préligures et de Haute-Provence : Germandrée luisante, Sabline cendrée.
Une espèce est protégée au niveau national : Sabline cendrée.
États à privilégier :
Les éboulis encore actifs (dont la dynamique n’a pas été modifiée par des aménagements humains) non colonisés par des espèces de pelouses et présentant une flore spécifique d’éboulis (lithophytes migrateurs…).
Les éboulis non pâturés par les troupeaux.
Cet habitat est globalement peu menacé.
Des stations de basse altitude peuvent souffrir de l’exploitation des matériaux pierreux.
La création de routes peut favoriser l’installation ponctuelle de cet habitat (remaniement des talus), tout comme elle peut entraîner la disparition de stations de manière directe en détruisant le pierrier ou de manière indirecte en empêchant l’apport de matériaux nouveaux. L’éboulis s’immobilise et est colonisé par d’autres habitats (cf. « Dynamique de la végétation »).
Les troupeaux s’écartant des parcours pastoraux peuvent entraîner la raréfaction de certaines espèces.
La création de nouveaux sentiers, en particulier lorsqu’ils sont parallèles à la pente, augmente le ravinement.
Améliorer les connaissances syntaxonomiques de l’habitat. Étudier l’impact d’un pâturage intensif et ponctuel pour les éboulis en cours de colonisation par les pelouses, dans l’optique d’une mise en place d’un plan de pâturage visant à restaurer ou à entretenir les éboulis (maintien de la mobilité des éléments et de la spécificité floristique) ; dans le cas particulier où la végétation ligneuse (comme celle du Berberidion vulgaris) se développe, expérimenter les actions cumulées d’un débroussaillage mécanique léger et d’un pâturage caprin approprié (charge pastorale à définir).
Bensettiti F., Herard-Logereau K., Van Es J. & Balmain C. (coord.), 2004. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 5 - Habitats rocheux. MEDD/MAAPAR/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 381 p. + cédérom. (Source)