9410-1 - Pessières à Doradille de lapiaz ou éboulis calcaires

Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats

Caractéristiques stationnelles

Pessière installée sur blocs calcaires, lapiaz, recouverts d’humus, de mousses, de Myrtille, à partir de 850 m (plus rarement en dessous), dans le Jura et les préalpes calcaires du nord.
Sur affleurements de calcaires durs (à plat) ou amoncellement de blocs calcaires de toutes dimensions sur pentes ; entre les blocs subsistent de nombreux vides ; sur rochers calcaires isolés au sein de sapinières-hêtraies.
La roche est couverte dans tous les cas d’un humus brut acide, granuleux ou fibreux, épais.
Terre fine, noire, riche en humus, pauvres en argiles, s’accumulant entre les blocs, hors d’atteinte de la plupart des racines ; sols lithocalciques sur lapiaz, humo-calciques sur éboulis.
Enracinement superficiel localisé dans la couche d’humus brut. Ralentissement de l’activité biologique par le froid qui explique l’humus brut et la croissance lente des arbres.
Présence de stations marginales en versant nord, dans les cuvettes à gel (peuplements assez courts).
À signaler l’hétérogénéité des conditions stationnelles : mosaïque de forêt, éboulis, dalles rocheuses, fentes de rochers et mégaphorbiaies.

Variabilité

Variations géographiques :
- race du Jura avec des variantes froides de karst ouvert et de lapiaz à diaclases de taille limitée ;
- race des Préalpes du nord avec Pin à crochets (Pinus uncinata), Rhododendron ferrugineux (Rhododendron ferrugineum), Homogyne alpine (Homogyne alpina), Luzule des neiges (Luzula nivea)…

Variations altitudinales :
- forme du montagnard avec habitats isolés au sein des sapinières-hêtraies ;
- forme du subalpin, largement répandue, riche en espèces alticoles : Sorbier faux néflier (Sorbus chamaemespilus), Mélampyre des bois (Melampyrum sylvaticum).

Variations selon le bilan hydrique :
- climat froid et humide, humus brut épais ; avec la Listère à feuilles cordées (Listera cordata), Sphaignes, Bazzania trilobata… ;
- variante de versant chaud et souvent de basse altitude avec Ctenidium molluscum, Tortella tortuosa, et présence possible du Pin sylvestre (Pinus sylvestris)…

Physionomie, structure

Ce type d’habitat se présente sous la forme d’une futaie dominée par l’Épicéa, accompagné du Sapin, du Bouleau verruqueux, du Sorbier des oiseleurs, de l’Alisier blanc, de l’Érable sycomore…
La strate arbustive est recouvrante avec l’Églantier des Alpes (Rosa pendulina), le Camerisier noir (Lonicera nigra), le Saule à grandes feuilles (Salix appendiculata), l’Alisier nain (Sorbus chamaemespilus)…
La strate herbacée est souvent dominée par la Myrtille en tapis dense.
Les mousses et l’humus brut recouvrent les blocs d’un épais tapis.

Confusions possibles

Difficile à confondre avec un autre type d’habitat compte tenu des substrats occupés (lapiaz ou éboulis calcaires très grossiers).
Éventuellement avec des plantations d’Épicéa sur sols riches en terre fine.

Dynamique

Spontanée :
Nous disposons de peu d’éléments concernant cette dynamique. Sur le long terme on peut imaginer :
- une première phase de colonisation par les Lichens et les Bryophytes, à l’origine de la matière organique ;
- installation d’une pelouse xérophile ;
- la matière organique s’accumule (très mauvaise décomposition du fait des conditions thermiques) sur de longues périodes ;
- arrivée de l’Épicéa, du Sorbier des oiseleurs sur ces couches d’humus.

Liée à la gestion :
Une exploitation trop intensive peut mettre en question la pérennité du peuplement.
—› Retour à des stades herbacés et arbustifs avec disparition d’une partie de l’humus brut.
Les régénérations sont parfois délicates se faisant sur l’humus, au milieu des Myrtilles ou sur les bois morts.

Habitats associés ou en contact

Végétation des fentes de rochers (UE : 8210).
Éboulis calcaires (UE : 8110).
Pelouses à Seslérie bleue (Sesleria albicans) (UE : 6170).
Fruticées diverses.
Mégaphorbiaies à Adénostyle à feuilles d’alliaire (Adenostyles alliariae), à Pétasite blanc (Petasites albus)(UE : 6430).
Érablaies diverses sur éboulis (UE : 9180*).
Hêtraies subalpines à Érables (UE : 9140).
Sapinières-hêtraies à Dentaire (Cardamine heptaphylla), à Orge d’Europe (Hordelymus europaeus) (UE : 9130).
Pineraies de Pin à crochets sur crêtes (UE : 9430).

Répartition géographique

Jura : fréquent dans les hautes chaînes, plus localisé sur les deuxièmes plateaux.
Préalpes calcaires du nord : Chartreuse, Vercors.

Valeur écologique et biologique

Les surfaces occupées par l’habitat sont plus ou moins importantes selon la région, selon l’altitude.
Forte diversité spécifique liée à l’hétérogénéité des conditions. Présence de populations originales d’Épicéa adaptées aux conditions marginales de ces stations.
Mosaïque d’habitats du plus grand intérêt par le grand nombre de conditions offertes à la diversité spécifique.
Rôle de protection joué fréquemment par ces forêts. Intérêt paysager.
Présence d’espèces rares (Lycopode à rameaux d’un an : Lycopodium annotinum, Lycopode sabine : Huperzia selago), fréquence d’espèces rares pour les régions concernées (Listère à feuilles cordées : Listera cordata)…

États de conservation

États à privilégier :
Futaie dense d’Épicéa.
Peuplement clair d’Épicéa avec Sorbier des oiseleurs.
Phase pionnière riche en Sorbier des oiseleurs.

Tendances et menaces

Surface tendant à la stabilité.
Peu d’évolution en massifs forestiers ; les reconstitutions en milieux ouverts seraient très lentes.
Peu de menaces potentielles.

Potentialités intrinsèques de production

La très courte saison de végétation entraîne des croissances très lentes ce qui peut conduire à des bois de très haute qualité (« bois de résonance ») malgré une productivité très faible.

Axes de recherche

Travaux restant à effectuer sur les modalités du fonctionne- ment dynamique de ce type d’habitat.

Bibliographie

 Bensettiti F., Rameau J.-C. & Chevallier H. (coord.), 2001. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 1 - Habitats forestiers. Volume 2. MATE/MAP/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 423 p. + cédérom. (Source)