1150-1 - Lagunes en mer à marées (façade atlantique)

Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats

Attention

Les unités marines des Cahiers d'Habitats ne sont plus utilisées suite à la publication de l'interprétation française des HIC marins (de Bettignies et al., 2021). L’interprétation française de l'unité HIC est disponible ici, ainsi que les correspondances avec la typologie nationale d'habitats benthiques (NatHab-Atl).

Caractéristiques stationnelles

Ces étendues côtières d'eau salée correspondent le long des côtes basses à des zones humides ou des marais côtiers (elles sont illustrées figure 2, page 42). Les échanges avec la mer se font soit par un étroit chenal que remonte la marée, soit, lorsque la lagune est fermée, par percolation sous un cordon de galets.
Parfois, l'apport d'eau de mer ne se produit qu'aux grandes marées de vives-eaux et lors des tempêtes hivernales. Les apports d'eau douce sont très variables temporellement.
Dans tous les cas, l'eau doit, par moments, passer par des phases d'hypersalinité (de son évaporation), condition nécessaire pour que l'on ne soit pas seulement en présence d'un marais saumâtre.

Variabilité

Dans le cas des lagunes naturelles, la variabilité est liée aux possibilités d'échange avec le milieu marin et à l'importance du couvert phanérogamique. Le plus souvent, les lagunes ont été aménagées par l'homme et la variabilité porte sur l'état d'entretien des voies de communications avec la mer et sur les activités humaines qui y sont menées (usages à des fins agricoles ou aquacoles, gestion en faveur des oiseaux).

Espèces "indicatrices"

Polychètes : Hediste diversicolor, Ficopomatus enigmaticus, Polydora ligni.
Mollusques bivalves : Abra ovata var. subrostrata, Cerastoderma glaucum ; gastéropodes : Hydrobia ventrosa, Potamopyrgus jenkinsi.
Crustacés : Sphaeroma hookeri, Idotea chelipes, Corophium insidiosum, C. multisetosum, Gammarus insensibile, G. chevreuxi, Microdeutopus gryllotalpa, Palaemonetes varians et dans le plancton, Artemia salina, espèce exclusive de ce milieu.
Hydraires : Cordylophora caspia, Odessia maerotica.
Insectes : Sigara selecta, larves de Chironomus salinarius, d'Halocladius varians.
Ces espèces se répartissent selon les gradients de salinité (des eaux oligohalines à hyperhalines). D'autre part, la plupart sont des espèces détritivores phytophiles (crustacés isopodes et amphipodes), leur abondance est donc fonction des débris végétaux (phanérogames et algues macrophytes).

Confusions possibles

Lorsque les eaux sont seulement dessalées, le marais est occupé par la communauté à Macoma balthica, caractéristique des estuaires (UE : 1130).

Correspondances

Typologie ZNIEFF-Mer (1994) : II.2.1.
Typologie EUNIS (1999) : A2.6
Typologie Marine Biotopes (1996) : Saline lagoons

Habitats associés ou en contact

Végétations annuelles pionnières à Salicornia (UE : 1310).
Prés à Spartina (Spartinion) (UE : 1320).
Prés-salés atlantiques (Glauco-Puccinellietalia) (UE : 1330).

Répartition géographique

En Manche, il existe des lagunes naturelles non aménagées. Il en est de même dans le sud de la Bretagne : mer Blanche à Mousterlin, marais de Trévignon...
Sur le littoral atlantique, l'essentiel des lagunes a été aménagé : marais de Séné, de Mesquer, de Guérande, marais Breton-Vendéen, Fier d'Ar, marais des Olonnes, de l'île d'Oléron, de la Seudre, parties très amont du bassin d'Arcachon (liste non exhaustive).

Valeur écologique et biologique

Les populations d'invertébrés de cet habitat sont très abondantes, étant donné la quantité de matière organique disponible. Ces peuplements paucispécifiques sont caractérisés par leur forte résilience après des événements dystrophiques comme peut en subir ce milieu extrême.
Ces peuplements d'invertébrés constituent la base alimentaire de nombreux poissons euryhalins effectuant tout ou partie de leur cycle biologique dans les lagunes : l'Anguille (Anguilla anguilla), le Bar (Dicentrarchus spp.), la Daurade royale (Sparus aurata), le Flet (Platichthys flesus), les Muges (Mugil cephalus, Chelon labrosus, Liza aurita, Liza ramada).
De nombreuses petites espèces de poissons sont également présentes : le Joël (Atherina boyeri), l'Épinoche (Gasterosteus aculeatus), la Gambusie (Gambusina affinis), la Perche soleil (Lepomis gibbosus), les Gobies (Pomatoschistus spp.), le Syngnathe de rivière (Synthagnus abaster)...
Les oiseaux sont exceptionnellement bien représentés. Résidents ou de passage, ils utilisent cet habitat comme aire de nourrissage, lieu de ponte ou de repos. Parmi ceux-ci figurent des Ardeidés, des Anatidés, des Laridés, des Rallidés, mais aussi des Cormorans, des Grèbes, de nombreux limicoles...

Tendances et menaces

Depuis très longtemps, ces zones ont subi l'action de l'homme : urbanisation, développement d'activités touristiques. Leur assèchement a aussi permis de gagner des surfaces agricoles (pour la culture ou l'élevage). La fragmentation de l'habitat constitue une menace réelle.
Les lagunes ont fait l'objet d'aménagements traditionnels liés aux propriétés spécifiques de ce type de milieu : extraction de sel, élevage en bassins aquacoles de poissons, d'huîtres, de crevettes... Si certaines de ces activités sont anciennes ou en renouvellement (saliculture), cet habitat souffre le plus souvent aujourd'hui de leur déprise. Celle-ci s'accompagne en effet d'un abandon progressif des pratiques qui autorisaient le bon renouvellement des eaux salées.
Ces milieux, bien que naturellement eutrophes, souffrent aujourd'hui de crises dystrophiques de plus en plus fréquentes.
Certains sites subissent des traitements de démoustication, étant donné que la présence des moustiques est liée au mode de gestion hydraulique.

Potentialités intrinsèques de production

Elles sont importantes et liées à une forte production primaire, qu'elle soit phytoplanctonique, microphytobenthique ou phanérogamique. Cette production phytoplanctonique rend le milieu naturellement riche en coquillages, d'où son utilisation fréquente à des fins aquacoles (verdissement des huîtres par exemple).
Plus globalement, cet habitat est utilisé pour la production de sel, de plantes halophiles et d'animaux marins en mode semi-extensif ou extensif. Par ailleurs, il fait de plus en plus l'objet d'activités cynégétiques, récréatives, pédagogiques... Certains marais sont devenus des réserves ornithologiques. Ces nouvelles vocations nécessitent de mettre en œuvre des modes de gestion appropriés.

Modes de gestion recommandés

La préservation de cet habitat est intimement liée à son fonctionnement hydrologique. Elle suppose l'entretien des voies de pénétration de l'eau salée et une qualité satisfaisante des eaux douces qui y transitent. À ce titre, le maintien ou le développement des activités traditionnelles de production (semi-extensive ou extensive) de sel, de plantes halophiles et d'animaux marins peuvent être très favorables à l'habitat. Partageant les mêmes besoins au niveau hydrologique, elles s'accompagnent en effet de pratiques assurant un bon renouvellement des eaux salées.
Pour les autres activités, des compromis seront à rechercher sur les sites, au cas par cas.
La plus grande prudence est de mise lorsque l'on souhaite aménager ces zones humides. Toute transformation de l'habitat par remblaiement est à proscrire.

Axes de recherche

L'inventaire de la faune de certaines lagunes naturelles est encore à effectuer.
Le fonctionnement hydraulique reste souvent mal connu et mériterait d'être étudié.

Fiche du cahier d'habitats (format pdf)
Bibliographie

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