8330-4 - Biocénose des grottes obscures (Méditerranée)

Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats

Attention

Les unités marines des Cahiers d'Habitats ne sont plus utilisées suite à la publication de l'interprétation française des HIC marins (de Bettignies et al., 2021). L’interprétation française de l'unité HIC est disponible ici, ainsi que les correspondances avec la typologie nationale d'habitats benthiques (NatHab-Med).

Caractéristiques stationnelles

Cet habitats correspond à des cavités immergées de grande dimension, surtout présentes dans les réseaux karstiques ennoyés, des cavités de petite taille et des microcavités isolées dans les amas de pierres et au sein de certains concrétionnements.
Les grottes obscures constituent des enclaves du domaine aphotique dans la zone littorale, en conséquence, elles présentent des conditions environnementales très originales. Les deux facteurs clés sont l'absence de lumière et le confinement. La circulation de l'eau dépend de facteurs topographiques, bathymétriques et géographiques locaux. Son renouvellement peut être occasionnel ou absent ; des indices de la stabilité hydrologique sont fournis par l'existence d'anomalies de température. Cette stagnation des eaux et ce confinement provoquent une très forte diminution de l'apport trophique au sein de l'écosystème. Le taux de recouvrement biologique varie de 80 à 50 % dans la zone la plus riche, pour devenir quasi nul dans la zone la plus confinée.

Variabilité

Les différentes grottes ayant des configurations et des expositions très diverses, elles présentent des taux de recouvrement et des compositions faunistiques très variables. La sélection des groupes trophiques et des groupes morphologiques ainsi que l'organisation spatiale sont régies par les conditions environnementales propres à chaque grotte.

Espèces "indicatrices"

Éponges : Petrobiona massiliana, Discoderma polydiscus, Corallistes masoni.
Bryozoaires : Puellina pedunculata, Ellisina gautieri.
Crustacés : Hemimysis speluncula.
Poissons : Oligopus ater, Gobie de Steinitz (Gammogobius steinitzi).

Confusions possibles

Dans les zones de transition, il est parfois difficile de déterminer les limites entre les grottes semi-obscures (fiche : 8330-3) et les grottes obscures.

Correspondances

Typologie ZNIEFF-Mer (1994) : IV.6.8.

Dynamique

La biocénose des grottes obscures est controlée par les apports énergétiques et par certains paramètres temporaires. Des expériences de colonisation indiquent que la production y est très faible, qu'elle diminue avec le confinement et qu'elle est dépourvue de cycle régulier. L'installation et la reconstitution du peuplement sont extrêmement lentes et aléatoires en raison de l'éloignement des sources exogènes de recrutement et de la rareté des apports énergétiques.

Habitats associés ou en contact

Les biocénoses des grottes obscures font généralement suite à celles des grottes semi-obscures (fiche : 8330-3) lorsqu'on s'enfonce dans un boyau ou dans une grotte.

Répartition géographique

Toutes les côtes rocheuses karstiques ou fracturées (côtes des Albères et de Provence-Alpes-Côte d'Azur, côtes ouest de la Corse) sont susceptibles de présenter des éléments plus ou moins complets des grottes obscures avec une prédominance dans les zones karstiques (Bouches-du-Rhône).

Valeur écologique et biologique

Les grottes obscures, compte tenu des conditions particulières qui y règnent, sont des milieux refuges. En effet, l'obscurité exclut les prédateurs chassant à vue, l'effet de paroi repousse les chasseurs actifs et les faibles ressources trophiques limitent les compétiteurs.
Cet effet refuge peut se classer en deux catégories selon son caractère occasionnel ou obligatoire. L'effet refuge obligatoire, qui concerne notamment certaines espèces cryptiques sensibles, est particulièrement spectaculaire dans la conservation des espèces reliques. D'origine très ancienne, celles-ci constituent
de vrais fossiles vivants que la stabilité du milieu et l'absence de compétition ont favorisé.
La présence d'espèces vivant normalement à des profondeurs plus grandes (espèces bathyales) s'explique par le fait qu'elles trouvent dans cet habitat les conditions de lumière, de stabilité du milieu et de trophisme qui sont les leurs dans leur milieu d'origine.

Tendances et menaces

Les grottes constituent des paysages de haute valeur esthétique, elles sont donc fréquemment visitées par les plongeurs. Leur hyperfréquentation, en modifiant la circulation de l'eau, l'entrée de particules, l'accumulation de bulles et la multiplication des contacts avec les organismes mettent en péril l'équilibre du peuplement.

Potentialités intrinsèques de production

La plongée dans les grottes sous-marines est un objectif fréquent des clubs de plongée, ce type de tourisme est en croissance constante.

Modes de gestion recommandés

La bonne gestion de cet habitat passe par deux séries de mesures :
- la surveillance de la qualité des eaux et de la pollution, en particulier de la charge en matières organiques ;
- la gestion de la fréquentation et l'éducation des personnes pratiquant des activités sous-marines.

Axes de recherche

L'étude des grottes a vraiment commencé il y a moins de 30 ans et nombreuses sont celles qui restent à découvrir. L'étude de la faune, de sa biologie et des facteurs environnementaux est encore à réaliser dans la plupart des cas.

Fiche du cahier d'habitats (format pdf)
Bibliographie

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