La ZNIEFF des "Mangroves et vasières du Maroni à l'Iracoubo" (type II) regroupe l'ensemble des habitats littoraux entre la rivière Iracoubo et le fleuve Maroni. Elle inclut cinq ZNIEFF de type 1 dénommées d'est en ouest : Irakompapi et ses forêts marécageuses, Rizières de Mana, Lagune de Caïman mouri, Pointe Isère et Plages de l'Amana.
D'un point de vue géomorphologique, le territoire de la ZNIEFF est le commencement d'une vaste fosse de sédimentation quaternaire qui débute dans la région d'Organabo où le socle précambrien subit l'érosion marine, pour prendre son maximum d'extension au Guyana. Sa formation résulte d'une transgression marine littorale sur le substratum rocheux précambrien puis une régression des eaux marines au cours de laquelle se sont mis en place successivement les différents cordons littoraux de type chenier. Ainsi, on distingue successivement de la mer vers l'intérieur trois types de paysages.
La plaine côtière récente (domaine des argiles marines) avec des mangroves à palétuviers et des marécages subcôtiers, entrecoupés ça et là de longs cordons sableux étroits, s'étend le long du trait de côte. La plaine côtière ancienne se trouve en retrait et est formée de sédiments sablo-argileux ou limoneux-argileux, souvent exondés mais de faible altitude. Enfin la zone de sables blancs borde le socle précambrien et est composée de mélange de sédiments quaternaires et de colluvions du socle. Ces trois unités paysagères regroupent une mosaïque de milieux très variés : cordons sableux littoraux, vasières, mangroves côtières, mangroves d'estuaires, arrière du cordon littoral constituée de lagunes saumâtres, marais d'eau douce, savanes inondables, forêts marécageuses et pinotières à Euterpe oleracea, forêts sur sables blancs, forêts de palmiers bâches Mauritia flexuosa. Par ailleurs cet ensemble complexe d'écosystèmes est soumis à une forte dynamique côtière due au système de dispersion amazonien. La côte orientée sud est - nord ouest est longée par des courants océaniques de même direction. Ainsi, des millions de m3 de sédiments fins provenant de l'Amazone sont transportés le long des côtes par les courants. Il en résulte un système morphodynamique spécifique alternant l'accumulation de sédiments formant des bancs de vases colonisés par la mangrove et des cycles d'érosion (cordons sableux ou mangroves en recul). Les milieux littoraux sont donc soumis à une perpétuelle évolution.
La végétation des plages actuelles est composée principalement de plantes rampantes à pouvoir colonisateur élevé, essentiellement Ipomea pes-caprae (Convolvulaceae), Canavalia maritima, et Vigna luteola (Fabaceae). Parmi les espèces accompagnatrices, les plus fréquentes sont des Cyperaceaes. On note également en arrière plage des fourrés à Hibiscus tiliaceus ainsi que des Amandiers pays (Terminalia catappa) et des grands Cactus cierges (Cereus hexagonus), espèce protégée.
La mangrove côtière est étroitement liée au déplacement d'est en ouest des bancs d'argiles. Les dépôts vaseux sont d'abord colonisés et fixés par Laguncularia racemosa, parfois précédée et accompagnée d'une herbe formant sur la vase des taches orbiculaires qui s'accroissent rapidement jusqu'à devenir confluantes, Spartina brasiliensis (Poaceae). Puis vient l'implantation du Palétuvier blanc (Avicennia germinans – Avicenniaceae -). Les estuaires des fleuves sont bordés d'une mangrove dominée par le Palétuvier rouge (Rhizophora racemosa – Rhizophoraceae -). On observe également plus en retrait et en amont, des forêts marécageuses composées du moutouchi-marécage (Pterocarpus officinalis – Fabaceae -), remarquable par ses larges contreforts, du Palmier Pinot (Euterpe oleracea) et du Palmier-bâche (Mauritia flexuosa). Les écosystèmes des jeunes marais comportent des mangroves côtières décadentes, des mares et lagunes d'eau saumâtre à Ruppia maritima (Ruppiaceae) et Nymphaea ampla (Nymphaeaceae). Les marais à végétation herbacée constituent les formations les plus importantes de la plaine côtière récente. Ils sont dominés par des Cyperaceae comme Eleocharis mutata, Cyperus articulatus et Cyperus giganteus, ou par des fougères comme Acrostichum aureum, Blechnum serrulatum et Thelypteris interrupta. Ces marais peuvent être parsemés plus ou moins de bouquets d'arbres dont le plus fréquent est Chrysobalanus icaco. Dans ces marais, comme dans les forêts marécageuses et le long des berges et des fleuves et rivières, le paysage est souvent marqué par des formations denses de moucou-moucou (Montrichardia arborescens – Araceae -).
Sur Mana, de vastes secteurs de marais côtiers, dénommés autrefois " Savane Sarcelle " et devenus "lagune de Caïman mouri", ont été transformés pour l'installation des rizières. À l'est de la région, dans la zone non perturbée par l'aménagement des rizières, entre les criques Irakompapi et Organabo, se développent des forêts galeries de palmier-bâche (Mauritia flexuosa). La plaine côtière est traversée par d'anciens cordons littoraux sableux ou argilo-sableux, parallèles au rivage actuel, portant une végétation forestière d'autant plus haute et riche floristiquement que les cordons sont anciens et donc plus éloignés du rivage. Sur les cordons plus récents, la forêt est marquée par le Courbaril (Hymenaea courbaril – Fabaceae -) et le palmier Awara (Astrocaryum vulgare) et des Inga spp. (Mimosaceae). Le Bois fourmis (Triplaris surinamensis – Polygonaceae -) fréquente les parties basses inondées. Sur les cordons intermédiaires, une forêt plus haute dont la voûte est située entre 15 et 25 m, présente principalement Tapiria guianensis (Anancardiaceae), Protium heptaphyllum (Burseraceae) et Simarouba amara (Simaroubaceae), ainsi que le palmier Comou (Oenocarpus bacaba). Enfin sur les plus anciens, Parinari campestris (Chrysobalanaceae) est fréquent sur les crêtes. La voûte forestière y est également dominée par le Wapa (Eperua falcata – Fabaceae -). Les étages moyens sont envahis par Duroia eriopila (Rubiaceae) et Phenakospermum guyannense (Strelitziaceae). Dans le sous-bois, on note la prédominance d'une Marantacée, Ischnosiphon obliquus.
Une quarantaine d’espèces végétales déterminantes est signalée, dont Stemmadenia grandiflora (Apocynaceae) qui n’est connue, en Guyane, que de la Pointe des Hattes où elle atteint la limite sud de son aire de répartition. Parmi ces espèces, 4 sont protégées : Passiflora moritziana (Passifloraceae), connue uniquement d’Awala, Cereus hexagonus (Cactaceae), la fougère Ceratopteris pteridoides et le palmier à huile américain, Elaeis oleifera.
La faune est très riche à l'image des biotopes rencontrés. On note tout particulièrement le Jaguar (Panthera onca), l'Ocelot (Felis pardalis), le Jaguarondi (F. yaguaroundi), le Cerf de Virginie (Odoicoileus virginianus) et le Raton crabier (Procyon cancrivorus). Par ailleurs, le Lamentin (Trichechus manatus) parcourt encore les estuaires et la loutre (Lontra longicaudis) peuple la crique Irakumpapi.
La région est surtout connue au niveau international pour ses plages qui sont parmi les lieux de ponte les plus importants au monde pour la Tortue Luth (Dermochelys coriacea). La population de Tortues Luth venant pondre sur les plages de l'Amana fait partie, semble-t-il, de la métapopulation du Plateau des Guyanes. Ainsi, d'une saison à l'autre, des échanges ont lieu entre le Surinam, le Guyana et la Guyane selon les changements de la physionomie des plages qui s'érodent ou s'engraissent en fonction de la dynamique côtière. D'autres espèces de tortues marines viennent également pondre sur les plages de l'Amana telles que la Tortue verte (Chelonia mydas) et la Tortue olivâtre (Lepidochelys olivacea) et de façon plus exceptionnelle la Tortue imbriquée (Eretmochelys imbricata). Chez les reptiles terrestres, notons la présence sur les cordons sableux du lézard Cnemidophorus lemniscatus, espèce patrimoniale. Ces plages sont aussi le principal site de reproduction de la très petite population du Gravelot de Wilson (Charadrius wilsonia) en Guyane.
Les bancs de vase bordant les plages ainsi que les plages de la Pointe Isère jouent également un rôle non négligeable dans l'accueil des limicoles nord-américains durant leur hivernage. Les lagunes se situant en arrière des cordons littoraux créent une complémentarité écologique avec les vasières et permettent l'accueil selon le niveau d'eau de très nombreux grands échassiers, limicoles et anatidés locaux (Anas bahamensis, Dendrocygna autumnalis) et nord-américains (Anas discors). De nombreuses espèces d'oiseaux à faible, voire très faible effectif sur le territoire guyanais, y sont observées : Spatule rose (Ajaia ajaja), Tantale d'Amérique (Mycteria americana), Flamant rose (Phoenicopterus ruber), Dendrocygne veuf (Dendrocygna automnalis), Canard musqué (Cairina Moschata), Canard à bosse (Sakidiornis melanotos), Caracara du Nord (Caracara cheriway). L'ancienne Pointe Isère et les formations végétales dunaires qui la prolongent vers l'est apparaissent également comme un couloir de migration pour les passereaux nord-américains (Parulines, Tyrannidés, ...). Les lagunes, d'une extension inégalée en Guyane, accueillent un grand nombre d'espèces d'oiseaux remarquables, parmi lesquelles il faut mentionner la plus belle population d'Echasse à queue noire (Himanthopus mexicanus) ainsi que les plus grands rassemblements d'anatidés du département. Il convient également de citer les espèces de rapaces comme le Busard de Buffon (Circus buffoni) et la Buse à queue barrée (Buteo albonotatus) inféodés à la région de Mana.
La ZNIEFF des "Mangroves et vasières du Maroni à l'Iraoubo" (type II) reprend en partie les contours de la Réserve Naturelle de l'Amana créée en 1998. Les zones humides de ce secteur littoral constituent des zones d'importance internationale pour l'accueil des oiseaux d'eau, et la région est d'ailleurs inscrite sur la liste des sites Ramsar. Le suivi et la protection de la population des tortues marines ont longtemps été effectués par le WWF. Ces actions sont aujourd'hui menées par la réserve naturelle avec un appui important de l'ONCFS (Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage) pour la surveillance. En effet, malgré l'existence de la réserve naturelle, le braconnage des oiseaux d'eau et le pillage des œufs de tortues marines sont encore une menace importante pour le maintien des populations. Les pêches accidentelles de tortues marines par des filets dérivants au large de la réserve de l'Amana sont également une cause de mortalité non négligeable. Des activités humaines sont présentes dans la ZNIEFF de l'Amana. En effet, les activités traditionnelles de la communauté amérindienne Kaliña du village d'Awala Yalimapo sont directement liées aux ressources naturelles de cette zone.
La ZNIEFF est délimitée comme suit:
N: De la pointe de Hattes (rive droite du fleuve Maroni) au pont de la RN1 sur l'Iracoubo (rive gauche du fleuve), la ZNIEFF s'étend jusqu'au trait de côte (ligne des plus basses eaux) le plus éloigné connu en 2009, en incluant vasières, mangroves et plages.
E: A l'est, le tracé longe la rive gauche de l'Iracoubo en excluant les zones urbanisées d'Iracoubo.
S: Au sud, la limite longe le sud des mangroves depuis la limite nord-ouest d'Iracoubo (point A) jusqu'à la rive gauche de la crique Sedan (point B). Après avoir longé la crique sur 100m en direction du sud (point C), elle longeles forêts inondées jusqu'à la rive gauche de l'Organabo (du point D au point E) puis jusqu'à la route départementale 8 au point F. Elle longe ensuite la D8 jusqu'à l'ancien aérodrome de Mana à la pointe des rizières (point G) et le contourne pour atteindre la rive droite de la Mana (point H). La limite traverse le fleuve tout droit jusqu'au bout du quai (point I) pour longer à nouveau la mangrove et les vasières jusqu'à la pointe des Hattes en excluant les zones habitées de la Bouverie, d'Awala puis de Yalimapo.
W: A l'ouest, la ZNIEFF s'étend jusqu'à la rive droite du fleuve Maroni.
Coordonnées des points mentionnés (WGS84, UTM 22 nord):
A (255547m; 606392m) - B (251035m; 609046m) - C (250982m; 608704m) - D (226625m; 615104m) - E (226337m; 614438m) - F (210793m; 618086m) - G (194130m; 626775m) - H (192744m; 626371m) - I (192362m; 627663m)