ZNIEFF 210000988
BASSE VALLEE DE L'AUBE DE MAGNICOURT A SARON-SUR-AUBE

(n° régional : 01720000)

Commentaires généraux

La basse vallée de l'Aube entre Magnicourt et Saron-sur-Aube constitue une grande ZNIEFF de type II de près de 9 300 hectares possédant des milieux alluviaux encore riches en faune et en flore. Elle comprend 11 ZNIEFF de type I qui regroupent les milieux les plus remarquables et les mieux conservés de cette partie de la vallée. Ce site présente en effet une mosaïque de groupements végétaux très intéressants, dont certains font partie de l'annexe I de la directive Habitats : boisements alluviaux inondables, prairies inondables et marécageuses, mégaphorbiaies, plus localement magnocariçaies et roselières, groupements aquatiques de la rivière, des noues et des bras morts. Les peupleraies, les prairies pâturées mésophiles et les cultures sont bien représentées sur le territoire de la ZNIEFF. Il n'a été noté ici que les espèces protégées et/ou rares (inscrites sur les listes rouges), les listes d'espèces plus détaillées se trouvant dans les ZNIEFF I.

Les forêts sont encore assez bien représentées, mais régressent de plus en plus au profit des peupleraies monospécifiques. Deux types différents de boisement se rencontrent : ce sont la chênaie-frênaie-ormaie inondable (forêt alluviale subclimacique bien caractéristique) et la chênaie pédonculée-frênaie. En général, la strate arborescente est dominée par le frêne et le chêne pédonculé, accompagnés par l'orme lisse et le frêne oxyphylle (inscrits tous les deux sur la liste rouge des végétaux de Champagne-Ardenne), l'orme champêtre, le tilleul à petites feuilles (localisé), l'érable sycomore, l'érable plane, les peupliers, etc. La strate arbustive est constituée par le groseillier rouge, la ronce bleue, le cornouiller sanguin, le noisetier, le fusain d'Europe, le cornouiller mâle (très localisé). Elle surmonte un tapis herbacé caractérisé par la laîche des bois, la laîche pendante, la laîche espacée, la laîche maigre (abondante), la canche cespiteuse, la clématite vigne-blanche, le sceau de Salomon multiflore, etc.

Les prairies inondables appartiennent en partie au groupement du Cnidion venosae et en partie au Bromion racemosi.

Elles peuvent être considérées, avec celles de la Bassée, comme la forme ultime vers l'ouest des prairies médioeuropéenne du Cnidion venosae, ce qui leur confère une valeur exceptionnelle. Elles ont fortement décru au profit de la culture ou des plantations de peupliers. Autrefois fauchées, beaucoup d'entre elles sont devenues aujourd'hui des pâtures permanentes. La flore est dominée par les graminées (houlque laineuse, flouve odorante, vulpin genouillé, fléole des prés, fétuque des prés, fétuque rouge, avoine élevée, gaudinie fragile, fétuque roseau, ) qu'accompagnent diverses renoncules, trèfles, patiences, potentilles... Elle abrite de nombreuses espèces végétales rares et protégées : la violette élevée, la gratiole officinale (toutes deux protégées en France, très rares et en régression spectaculaire), l'ail anguleux (les vallées de la Seine et de l'Aube étant parmi les dernières vallées où il se rencontre encore) et l'œnanthe moyenne (tous deux étant protégés au niveau régional et en très forte régression). Ils sont tous inscrits sur la liste rouge des végétaux de Champagne-Ardenne, de même que l'œnanthe de Lachenal et une petite fougère, l'ophioglosse vulgaire.

Dans les zones moins inondables se développe une prairie proche de l'Arrhenatherion avec l'inule britannique (encore appelée inule des fleuves), protégée au niveau régional et inscrite sur la liste rouge régionale. Cette prairie est riche en herbes variées dominées par l'avoine élevée, la fétuque des prés, le gaillet vrai, la centaurée jacée, accompagnés par le colchique des prés, la renoncule âcre, le plantain lancéolé, le crépis bisannuel, la vesce des haies, la fétuque rouge, le pâturin des prés, le cirse tubéreux, l'inule des saules, la sanguisorbe officinale, etc.

Il subsiste, sur la commune de Rhèges-Bessy, une petite pelouse sèche (0,4 hectare) dominée par le brome dressé, avec la violette élevée, l'arabette hérissée, la marjolaine, la coronille bigarrée, l'inule conyze, la pimprenelle petit boucage, la violette hérissée, etc. Elle est plus ou moins envahie par des fruticées renfermant le cornouiller sanguin, l'aubépine monogyne, le prunellier épineux et l'églantier.

Dans les zones les plus humides de la vallée (certaines clairières marécageuses, prairies délaissées, etc.) se développent des mégaphorbiaies eutrophes avec une végétation dense et luxuriante caractérisée par la reine des prés, le pigamon jaune, l'épilobe hirsute, l'épilobe à petites fleurs, le liseron des haies... Localement, on peut également rencontrer des cariçaies à grandes laîches (laîche distique, laîche des marais, laîche aiguë, laîche des rives, etc.) et des roselières (à phragmite et baldingère). Ces différents milieux abritent la renoncule grande douve protégée en France, la gesse des marais, la laîche paradoxale et la germandrée des marais protégées en Champagne-Ardenne et inscrites sur la liste rouge régionale avec l'euphorbe des marais, le potamot coloré et le peucédan des marais. Certaines prairies abandonnées ou mégaphorbiaies tendent à se boiser.

La végétation flottante de l'Aube est assez bien développée, occupant une partie importante du lit mineur de la rivière ; elle est caractérisée par la présence de la renoncule flottante et du potamot à feuilles flottantes (inscrit sur la liste rouge régionale des végétaux) accompagnés par le cératophylle épineux, le nénuphar jaune, l'élodée du Canada ; dans les groupements amphibies se distinguent le faux-riz et la grande berle, inscrits sur la liste rouge régionale, le plantain d'eau à feuilles lancéolées, le butome en ombelle, etc.

Une station d'azolla fausse-fougère a été découverte sur le site, c'est aujourd'hui la seule station répertoriée de l'Aube.

La faune entomologique est variée et bien diversifiée, avec près d'une cinquantaine d'espèces d'Odonates, Orthoptères et papillons de jour, dont une libellule protégée en France, la cordulie à corps fin (inscrite à l'annexe II de la convention de Berne, aux annexes II et IV de la directive Habitats et figurant sur le livre rouge de la faune menacée en France). Elle est également inscrite sur la liste rouge régionale, de même que trois autres libellules (grande aeschne, gomphe vulgaire et gomphe à pinces) ainsi que trois criquets (criquet ensanglanté, criquet verte-échine et criquet marginé).

Un crustacé très rare dans l'Aube, le chirocéphale diaphane, a été remarqué sur le site (CART Jean-François) au niveau d'anciennes gravières.

Le site héberge de nombreuses espèces d'oiseaux (plus d'une cinquantaine) qui s'y reproduisent ou pour certaines s'y nourrissent. Une héronnière de près de 120 individus (donnée de 1996) est présente dans la ZNIEFF. Dans les boisements se rencontrent divers pics (pic épeiche, pic vert, pic noir), le milan noir, le geai des chênes, la sittelle torchepot, le loriot d'Europe, la tourterelle des bois, le pouillot siffleur, etc. Le héron cendré, le canard colvert, la poule d'eau et le grèbe castagneux fréquentent la rivière, les noues et les secteurs humides. La pie-grièche écorcheur, la pie-grièche grise, l'hirondelle de rivage, le faucon hobereau inscrits sur la liste rouge des oiseaux menacés de Champagne-Ardenne, nidifient dans la ZNIEFF. Il en va de même pour le martin-pêcheur, le gobemouche gris, l'alouette des champs, le bruant proyer, le rougequeue à front blanc, la fauvette babillarde, le pipit farlouse...

Les amphibiens sont bien représentés notamment par le triton crêté (inscrit à l'annexe II de la convention de Berne, aux annexes II et IV de la directive Habitats, dans le livre rouge de la faune menacée en France et sur la liste rouge régionale des amphibiens), le triton ponctué, les grenouilles vertes, rousse, agile et le crapaud commun..

Les anciennes sablières situées entre "le Champ Moinet" et "la Grande Contrée" recèlent le pélodyte ponctué (très rare dans l'Aube, protégé en France depuis 1993, inscrit à l'annexe III de la convention de Berne et dans le livre rouge de la faune menacée en France, catégorie "vulnérable") et le crapaud calamite, tous les deux étant inscrits sur la liste rouge régionale. Ces dernières appartiennent à la siucrerie d'Attigny qui a le projet, en partenariat avec le Conservatoire du Patrimoine Naturel de Champagne-Ardenne, de faire une opération de gestion (remise en état après comblement partiel de la mare à reproduction).

On peut aussi y rencontrer le lézard vivipare, rare dans l'Aube où il se situe à sa limite d'aire de répartition.

L'intérêt zoologique est également lié aux mammifères avec la présence de trois espèces rares protégées en France et inscrites sur la liste rouge régionale : la musaraigne aquatique (annexe III de la convention de Berne) et deux chauves-souris, le murin de Natterer et l'oreillard gris (tous deux inscrits à l'annexe II de la convention de Berne).

C'est de plus un site paysager qui joue un rôle fondamental dans l'équilibre de la vallée de l'Aube. C'est une zone encore riche en milieux naturels, mais qui sont en diminution constante et très menacés par les défrichements et les mises en culture des prairies (maïs le plus souvent), leur transformation en jachères, les plantations de peupliers (des prairies et des boisements alluviaux) et dans une moindre mesure par l'intensification du pâturage.

Commentaires sur la délimitation

La ZNIEFF correspond aux limites des habitats ( boisements, prairies, groupements marécageux et aquatiques, cultures...) de la basse vallée d'Aube (située entre Magnicourt et Saron-sur-Aube).