ZNIEFF 210002009
MASSIF FORESTIER D'ARGONNE

(n° régional : 01950000)

Commentaires généraux

Le massif forestier d'Argonne est l'un des massifs les plus vastes de la région. Par son étendue, par son caractère typique, par la richesse de sa flore et de sa faune, ce massif se range parmi les sites majeurs de Champagne-Ardenne. Il constitue une vaste ZNIEFF de type II de 41 840 hectares, séparée en deux par la vallée de l'Aisne et située à la limite de trois départements : Marne, Ardennes et Meuse. Plusieurs ZNIEFF de type I sont incluses dans ce vaste massif et font l'objet de fiches séparées. Le massif est établi sur une couche géologique particulière, la gaize, roche siliceuse très dure constituée essentiellement à partir de minuscules fragments d'éponges. L'Argonne constitue un petit pays particulier au caractère submontagnard prononcé, composé de vastes forêts au sein d'une région de pacages et de cultures.

La végétation forestière est très typique et adaptée aux sols acides :

- chênaie-hêtraie acidiphile montagnarde sur les versants nord (à luzule blanche, luzule des bois, véronique officinale, canche flexueuse, etc.) et chênaie plus thermophile sur les versants sud (avec le sorbier des oiseleurs, le sorbier blanc, le néflier, la canche flexueuse, la mélitte à feuilles de mélisse, etc.),

- chênaie- hêtraie mésoneutrophile à mésotrophe (avec le charme, le sorbier des oiseleurs, le tilleul à petites feuilles, le merisier, le chèvrefeuille rampant, la laîche à racines nombreuses, l'anémone des bois) et chênaie-hêtraie acidiphile de plateau (avec la myrtille, la callune vulgaire, la fougère aigle, la molinie bleue, etc.). Les ourlets forestiers (Potentillo erectae-Holcion mollis, non répertorié dans la base de données du logiciel et codé dans la typologie sous l'appellation "groupements mésophiles de hautes herbes des clairières et lisières forestières") sont très intéressants avec notamment le gaillet des bois (espèce médioeuropéenne continentale, proche de sa limite d'aire régionale)

- en fond de vallon, en bas de pente et en périphérie de certains étangs, aulnaie-frênaie (et très localement aulnaie) avec, dans certains secteurs des ormes lisses de belle taille, le cassis (inscrits tous les deux sur la liste rouge des végétaux menacés de Champagne-Ardenne.

Ponctuellement, une végétation relictuelle de lande (Calluno-Genistion) subsiste (aux environs de Quatre-Champs, Marcq et Cornay). La première abrite: le genêt d'Allemagne est une espèce continentale protégée au niveau régional, rare en France (où elle n'existe guère que dans l'est et le centre du pays) et en très forte régression en Champagne-Ardenne (uniquement trois stations dans les Ardennes, avec celles de Toges et de Quatre-Champs, toutes dans un état très précaire)) et la bruyère cendrée , protégée au niveau régional (seule station connue des Ardennes), d'origine atlantique et très à l'est de sa limite normale de répartition (région parisienne).

Diverses zones prairiales complètent l'intérêt de la ZNIEFF, avec une flore caractéristique des prairies fraîches à humides, fauchées ou pâturées, ainsi que des pelouses oligotrophes relevant du Violon caninae.

Les étangs sont nombreux, les plus importants ont fait l'objet de fiches ZNIEFF de type I (étang de Florent-en-Argonne, étangs de Bièvres, étangs de Châtrices), certains sont aménagés pour la chasse, d'autres pour la pisciculture. Leur végétation comprend des roselières(à phragmite, massette à larges feuilles, massette à feuilles étroites, lycope d'Europe, valériane officinale…) des magnocariçaies (à laîche des marais, laîche des rives, laîche vésiculeuse, laîche pendante, laîche paniculée, laîche faux-souchet), des groupements aquatiques à Nymphéa blanc ainsi que des groupements amphibies et de rives exondées.

De nombreuses espèces végétales rares et/ou protégées se rencontrent sur le territoire de la ZNIEFF comme par exemple l'orme lisse, la stellaire des bois (en limite d'aire), l'épipactis pourpre (orchidée protégée dans la Marne), l'élatine à six étamines (espèce subatlantique rare en France, protégée au niveau régional)), la prêle d'hiver (assez rare en plaine), le géranium livide, le calamagrostis faux-roseau, d'origine montagnarde et rare en Champagne, le genêt d'Allemagne (protégé, très rare et menacé de disparition totale en Champagne-Ardenne), la bruyère cendrée (potection régionale), la campanule cervicaire (protection nationale), le scirpe de Sologne (protection départementale), la limoselle aquatique, le gnaphale jaunâtre, la bermudienne aux yeux bleus (espèce introduite et naturalisée depuis un siècle), l'orobanche du genêt, la prêle des bois, la prêle d'hiver, etc. La plupart d'entre elles sont inscrites sur la liste rouge des végétaux menacés de Champagne-Ardenne. Certaines fougères remarquables, rares à très rares en plaine s'y observent au, notamment le polystic des montagnes (protégé en Champagne-Ardenne), le polypode du hêtre et le polypode du chêne (orophyte très rare en plaine) et la fougère écailleuse.

La faune est tout aussi importante et diversifiée (pour des informations plus complètes, se reporter aux listes d'espèces figurant dans les 12 ZNIEFF de type I associées).

Certains ruisseaux possèdent une bonne qualité des eaux, avec de nombreux macro-invertébrés (Trichoptères, Ephémères) spécifiques des ruisseaux montagnards aux eaux vives, peu ou pas altérées et notamment de belles populations d'Electrogena ujhelyii au niveau des sources et des têtes de ruisseau. De même, on observe de très importantes stations d'Osmylus fulvicephalus (névroptère dont la larve est semi-aquatique) ainsi qu'une espèce rare et en voie de disparition dans toute l'Europe, Ernodes articularis.

Les poissons sont également bien représentatifs de la qualité de ces ruisseaux, avec la présence de gîtes de ponte de truite fario et de chabot. Ce dernier est inscrit, comme la lamproie de Planer (qui se reproduit aussi dans la ZNIEFF) à l'annexe II de la Directive Habitats.

Les papillons sont bien représentés et comportent une espèce protégée en France, le damier de la succise : il est inscrit à l'annexe II de la convention de Berne, aux annexes II et IV de la directive Habitats, dans le livre rouge de la faune menacée en France (catégorie "en danger") et sur la liste rouge régionale, de même que le damier noir. D'autres papillons plus communs s'y observent (machaon, paon du jour, argus frêle, demi-argus, carte géographique, échiquier, petite tortue, citron, Robert-le-diable, petit Sylvain, hespérie de la houlque, diverses piérides., etc.).

Les criquets et les sauterelles sont bien représentés : le criquet ensanglanté, inscrit sur la liste rouge des Orthoptères de Champagne-Ardenne se remarque, accompagné par de nombreux criquets chanteurs (criquet duettiste, criquet des pâtures, criquet des clairières, criquet mélodieux), ainsi que par la grande sauterelle verte phanéroptère porte-queue, le tétrix des clairières, le criquet à long corselet, le criquet riverain, la decticelle cendrée, la decticelle bariolée, la sauterelle ponctuée, le grillon des bois, le grillon champêtre....

Les libellules présentent la même tonalité biogéographique et centreuropéenne qu'une partie de la flore, avec de nombreuses espèces inscrites sur la liste rouge régionale des insectes, comme par exemple le sympétrum jaune d'or, l'agrion nain, l'agrion gracieux et l'agrion mignon, l'aeschne printanière, la grande aeschne et l'aeschne isocèle, le cordulégastre bidenté (belles populations au niveau des sources), l'orthétrum bleuissant et l'orthétrum brun, la cordulie à taches jaunes, la cordulie métallique, la cordulie à deux taches et d'autres plus communes comme par exemple la libellule à quatre taches, la libellule déprimée, la libellule écarlate, le gomphe joli, l'aeschne bleue, la cordulie bronzée, l'agrion à larges pattes, l'agrion porte-coupe, l'agrion jouvencelle, l'agrion élégant, la petite nymphe au corps de feu, la naïade aux yeux rouges, etc.

Les populations des batraciens sont diversifiées grâce à la présence sur le site des étangs avec le triton crêté, le sonneur à ventre jaune, la rainette verte et le crapaud accoucheur, protégés en France (depuis 1993) et en Europe (convention de Berne et directive Habitats), figurant dans le livre rouge de la faune menacée de France et inscrits, avec la salamandre, sur la liste rouge des amphibiens de Champagne-Ardenne.

Pour les reptiles, la coronelle d'Europe et le lézard des souches (annexe IV de la directive Habitats), inscrits sur la liste rouge régionale, sont également présents.

Le site accueille de nombreuses espèces d'oiseaux attirés par des biotopes variés pour se nourrir, pour s'y reposer ou pour s'y reproduire (cf. ZNIEFF I pour listes plus complètes d'oiseaux). Certains sont rares au niveau régional ou national, d'autres sont en régression plus ou moins alarmantes comme la bouscarle de Cetti, nicheur très rare en Champagne-Ardenne, la chouette chevêche (nicheur peu commun et dont les effectifs sont en diminution importante), le milan noir, le milan royal et le faucon hobereau, la rousserolle verderolle et la rousserolle turdoïde (inféodée aux roselières et aux étangs, nicheur rare au niveau de la région), le tarier d'Europe (dont les effectifs régionaux sont faibles et en régression), l'hirondelle des rivages (la moins commune de nos trois espèces d'hirondelles), la pie-grièche grise et la pie grièche écorcheur, toutes deux en régression dans la région, le pigeon colombin et le râle d'eau, nicheurs peu communs. Ils sont tous inscrits sur la liste rouge des oiseaux de Champagne-Ardenne.

De nombreux oiseaux d'eau y séjournent lors des migrations, y hivernent ou même s'y reproduisent : grèbe huppé, grèbe castagneux et foulque (oiseaux nicheurs), sarcelle d'hiver et sarcelle d'été, canard colvert, fuligule morillon et fuligule milouin, cygne tuberculé, chevalier culblanc, chevalier sylvain, etc. De nombreux rapaces diurnes ou nocturnes survolent les étangs et/ ou la forêt environnante : milan noir et milan royal, faucon crécerelle, busard Saint-Martin, chouette hulotte, chouette effraie... Divers oiseaux plus communs fréquentent aussi le site, notamment les pouillots (fitis, siffleur, véloce), le pinson des arbres, le roitelet huppé, le loriot d'Europe, les mésanges (noire, charbonnière et huppée), le troglodyte mignon, la tourterelle des bois, le pigeon ramier, les grives draine et musicienne, etc.

Les mammifères forestiers sont également bien représentés par le gros gibier (cerf, chevreuil, sanglier) et les carnivores (chat sauvage, putois, martre, fouine, etc.). La musaraigne aquatique, inscrite sur la liste rouge régionale, fréquente les étangs.

La ZNIEFF fait partie du réseau international des zones humides de la convention de Ramsar et de la directive Oiseaux (Z.I.C.O. des étangs d'Argonne).

Commentaires sur la délimitation

La zone prend en compte le grand massif forestier d'Argonne et certains environs proches biologiquement très riches.