ZNIEFF 230030749
LES MARAIS DE JUMIÈGES

(n° régional : 85170001)

Commentaires généraux

Dans les boucles de la vallée de la Seine aval, les marais de Jumièges s’étendent à cheval sur les communes de Jumièges et du Mesnil-sous-Jumièges. Ils sont inscrits au cœur de la Boucle de Jumièges, entre les Conihouts (habitations alignées en bordure de Seine) de ces deux communes, la Forêt de Jumièges, et les carrières en exploitation de Jumièges, sur des terrains alluviaux récents.

L’ensemble de la zone humide de cette boucle est reconnue en ZNIEFF de type II (Marais de la Boucle de Jumièges).

Le présent sous-ensemble des « Marais de Jumièges » englobe, quant à lui, les secteurs les plus remarquables, et est répertorié en ZNIEFF de type I.

Le dispositif Natura 2000 intègre également cette zone dans la ZPS FR2310044 "Estuaire et marais de la Basse Seine" au titre le la Directive Oiseaux, et dans la ZSC FR2300123 "Boucles de la Seine Aval" au titre de la Directive Faune, Flore, Habitats .

Ce territoire est plus ou moins inondable en fonction des variations topographiques, même si les digues limitent les crues inondantes de la Seine. Dans une certaine mesure, les inondations hivernales constituent une contrainte pour les activités agro-pastorales. Mais elles déterminent la présence d’habitats, d’une flore et d’une faune de grand intérêt patrimonial.

Ces terres argilo-limoneuses lourdes ne peuvent pas être facilement emblavées : elles sont plutôt indiquées pour une utilisation prairiale. Sur ces prairies mésohygrophiles à hygrophiles, une première fauche intervient souvent en fin de printemps, en juin, suivie d’une mise à l’herbe estivale des animaux et/ou d’une fauche du regain. Ces prairies de fauche (alliances phytosociologiques de l’Arrhenatherion elatioris - sous-alliance du Colchico-Arrhenatherenion - et du Bromion racemosi) sont donc utilisées de façon plus ou moins intensive suivant l’humidité des sols.

Certaines terres, notamment les plus ressuyées et proches des fermes, sont utilisées uniquement comme pâtures. Les pâtures hygrophiles sont à rattacher à l’association phytosociologique de l’Hordeo secalini-Lolietum perennis, classique dans les zones alluviales.

Par ailleurs, des secteurs d’affleurement de tourbe alcaline permettent la présence de végétations de bas-marais, avec notamment des groupements comprenant le Cirse des Anglais (Cirsium dissectum) et le Jonc subnoduleux (Juncus subnodulosus), rares dans la région. Ces végétations ne se retrouvent que dans la présente zone de type I.

Quelques prairies de fauche parmi les plus extensives et humides abritent le groupement à Oenanthe à feuilles de Silaus (Oenanthe silaifolia) et Séneçon aquatique (Senecio aquaticus). Cette association du Senecio aquatici-Oenanthetum silaifoliae est de plus en plus rare et menacée dans les vallées du Nord-Ouest de la France.

Des dépressions permettent le développement ponctuel de formations hygrophiles (groupements de l’Eleocharo palustris-Oenanthetum fistulosae, de l’Alopecuretum geniculati sensu-lato, du Phalaridetum arundinaceae s.-l.). Quelques mares ou fossés profonds abritent également des roselières basses à Oenanthe aquatique (Oenanthe aquatica) et Rorippe des marais (Rorippa palustris).

Des réseaux de haies vives et d’alignements de saules et frênes taillés en têtards structurent le paysage, avec les fossés, les mares et les dépressions humides.

FLORE

Plus d'une cinquantaine d'espèces végétales déterminantes de Znieff (taxons exceptionnels à assez rares en Haute-Normandie) ont été recensées sur ce site écologiquement très riche.

Parmi celles-ci, les exceptionnels Eleocharide à une glume (Eleocharis uniglumis) et Stellaire des marais (Stellaria palustris), les très rares Jonc subnoduleux (Juncus
subnodulosus), Scirpe des marais (Scirpus lacustris), Séneçon aquatique (Senecio aquaticus), Butome en ombelle (Butomus umbellatus), Plantain d’eau lancéolé (Alisma lanceolatum) et Epilobe des marais (Epilobium
palustre) ; les rares Oenanthes à feuilles de Silaus (Oenanthe silaifolia), fistuleuse (O. fistulosa) et aquatique (O. aquatica),et  Euphorbe des marais (Euphorbia
palustris)…

On note également le Dactylorhize négligé (Dactylorhiza
praetermissa), l’Orge faux-seigle (Hordeum secalinum), le Brome rameux (Bromus racemosus), les Laîches (Carex) blonde, aigüe, verdoyante, bleuâtre et raide, le Pigamon jaune (Thalictrum flavum), l’Hydrocotyle vulgaire (Hydrocotyle vulgaris), la rare Véronique en écus (Veronica scutellata),… et bien d’autres encore.

Noter le statut de protection de plusieurs espèces telles le Séneçon des marais (Senecio paludosus) et la Gesse des marais (Lathyrus palustris).

Les milieux qui concentrent les stations d’espèces végétales les plus intéressantes sont les prairies tourbeuses, les dépressions, les fossés et les mares.

Ces marais constituent ainsi l’une des zones les plus riches floristiquement de la vallée de la Seine. La zone en Znieff type II qui se prolonge alentour n’abrite qu’une partie de ce cortège floristique de haut niveau.

FAUNE

De nombreux éléments faunistiques remarquables ont également été recensés.

Le secteur est assez riche en oiseaux avec une quinzaine d'espèces déterminantes de Znieff, dont :

-l’exceptionnel Râle des genêts (Crex crex) qui vit dans les prairies de fauche extensives et humides. Cet oiseau est l’un des plus rares et menacés au niveau international, ce qui lui a valu d’être inscrit sur la liste des Oiseaux en danger dans le Monde.

-une population de Chouette chevêche ou Chevêche d’Athéna (Athene noctua), espèce de plus en plus rare et menacée, qui niche dans les secteurs comprenant de vieux arbres creux (saules ou frênes têtards), de même que le Rougequeue à front blanc (Phoenicurus phoenicurus),

-le rare Faucon hobereau (Falco subbuteo) qui niche dans les grandes haies ou les bosquets et utilise un vaste terrain de chasse.

-quelques Vanneaux huppés (Vanellus vanellus), espèce rare en nidification, qui se reproduisent dans des pâtures humides ou en bordure de dépressions,

-des populations de Tarier des prés (Saxicola rubetra) et de Bergeronnette printanière (Motacilla flava), passereaux assez rares dans la région, disséminés dans les prairies de fauche les plus extensives.

-d'autres passereaux nicheurs, notamment la Gorgebleue à miroir (Luscinia svecica) ou encore le Phragmite des joncs (Acrocephalus schoenobaenus).

-de nombreux oiseaux d’eau (Anatidés, limicoles, Ardéidés, rapaces, passereaux …) qui utilisent les prairies inondées, les mares et les gravières comme halte migratoire.

En Amphibiens, noter en espèce patrimoniale la Rainette verte (Hyla arborea). Le Crapaud calamite (Bufo calamita), espèce pionnière rare et menacée dans la région et les régions limitrophes, a semble t-il été observé aussi (non listé ici).

En Odonates, trois espèces déterminantes de Znieff sont présentes : l'Aeschne affine (Aeshna affinis), la Naïade au corps vert (Erythromma viridulum), et l'Agrion mignon (Coenagrion scitulum).

Noter également la fréquentation du sites par diverses espèces de chiroptères dont quatre sont déterminantes de Znieff. Cette présence semble tout ou partie en rapport avec la proximité immédiate de l'abbaye de Jumièges, répertoriée en Znieff de type I pour l'hébergement de ces mammifères.

Concernant l’évolution des milieux naturels dans ce secteur, l'intensification des pratiques de l’élevage peut amener certains agriculteurs soit à mettre en culture annuelle soit à délaisser l'usage agricole des prairies humides, qui risquent alors d’être plantées en peupliers ou abandonnées. Ces changements, ainsi qu’une trop forte intensification agricole (augmentation des intrants, de la pression de pâturage, de la précocité des fauches…), génèrent toujours une grave banalisation de la flore et de la faune.

Ainsi, un soutien des pratiques de fauche et de pâturage extensives est nécessaire pour maintenir la qualité biologique et paysagère du marais et pérenniser sa fonctionnalité et son intérêt agricole traditionnel.

En ce sens, les opérations agri-environnementales constituent une réponse positive (bien qu’inévitablement partielle) à ces enjeux.

 

 

     
Commentaires sur la délimitation
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