La Forêt domaniale de Tournehem marque le rebord oriental du Pays de Licques ; elle s’étend en partie sur le versant droit très festonné de la Vallée de la Hem, au sud de Bonningues-lès-Ardres et Tournehem-sur-la-Hem. C’est une forêt relativement homogène dans la nature de ses substrats (hauts plateaux crayeux plus ou moins couverts de limons) mais très mouvementée quant à son relief. Parsemée d’une multitude d’anciennes carrières de craie aujourd’hui reboisées, elle présente en de nombreux secteurs une topographie en bosses et en creux tout à fait particulière (Bois d’Artois, Bois de Licques, le Wensquedal, Noire Vallée...). Son altitude oscille entre 85 et plus de 170 m et ses servants abrupts dominant des vallons encaissés sont tout à fait typiques de la physionomie des bois et forêts du Haut Artois et du Pays de Licques.
De très nombreuses parcelles forestières ont malheureusement été exploitées ces toutes dernières années. Cette forêt est donc aujourd'hui constituée d'une alternance de parcelles encore en futaie et de coupes récentes, voire de jeunes plantations. Les atteintes à l'écosystème forestier d'un tel traitement sylvicole à si grande échelle sont importantes et risquent de durer de nombreuses années.
Au niveau de certaines lisières, l’agriculture intensive eutrophise les sols et ce phénomène, associée à l’usage d’herbicides dégrade l’expression floristique des ourlets, tandis que la présence de routes longeant la lisière en tronque le développement latéral.
On retrouve en Forêt de Tournehem les associations forestières typiques des collines crayeuses de l’Artois :
Érablaie à Mercuriale vivace (Mercuriali perennis - Aceretum campestris) avec par endroits l’Ornithogale des Pyrénées (Ornithogalum pyrenaicum), espèce rare et vulnérable, protégée dans le Nord-Pas de Calais, que nous n'avons pas revue en 2015 ;
Hêtraie à Jacinthe des bois (Endymio non-scriptae - Fagetum sylvaticae), avec la Cardamine à bulbilles (Cardamine bulbifera), très rare, vulnérable et protégée dans le Nord-Pas de Calais ou l’Épipactis pourpré (Epipactis purpurata), espèce également très rare et vulnérable dans le Nord-Pas de Calais.
Au sein de ces grands types forestiers, divers gradients trophiques, dynamiques et hydriques expliquent leur diversité phytocénotique intrinsèque, ceux-ci présentant diverses sous-associations typiques, de même qu’on peut noter l’apparition ponctuelle d’autres communautés végétales forestières ou herbacées (versants nord humides et froids riches en fougères, fond de vallon avec frênaie hygrocline linéaire, ourlets préforestiers, etc.) et d’espèces d’intérêt patrimonial. On trouve ainsi l’Euphorbe pourprée (Euphorbia dulcis subsp. incompta), très rare, vulnérable et protégée dans le Nord-Pas de Calais, etc. Le Gnaphale des forêts (Gnaphalium sylvaticum) se développe dans les coupes forestières sur limons acides (Epilobion angustifolii), tandis que les coupes sur substrats crayeux sont colonisées par l’Atropetum belladonnae.
Au sud, mais surtout au nord-ouest du Mont de Bonningues (lieu-dit le Gobsav), des fragments de végétations calcicoles herbacées persistent : pelouse fragmentaire du Gentianello amarellae - Avenulion pratensis et ourlets du Trifolion medii. Ces végétations abritent quelques espèces d'intérêt patrimonial : Bunium noix-de-terre (Bunium bulbocastanum) et Ancolie commune (Aquilegia vulgaris) dans les ourlets ; Aspérule à l'esquinancie (Asperula cynanchica), Chlore perfoliée (Blackstonia perfoliata), etc. dans les pelouses.
La Forêt domaniale de Tournehem et ses lisières abritent une faune diversifiée.
Concernant l’avifaune, le Busard Saint-Martin (Circus cyaneus) et la Bondrée apivore (Pernis apivorus), tous deux inscrits à l’Annexe I de la Directive Oiseaux, sont nicheurs probables sur le site. Le Busard Saint-Martin est principalement présent dans l’Ouest de la région (TOMBAL [coord.], 1996). La Bondrée apivore vit dans des boisements de plusieurs dizaines d’hectares entourés de plusieurs centaines d’hectares de prairies (TOMBAL [coord.], 1996).
Il est important de souligner la présence du Muscardin (Muscardinus avellanarius), un des mammifères les plus rares dans le Nord – Pas-de-Calais, dont la population en forte régression ces dernières année, confère à l’espèce le statut régional de rare.
Pour la Fonge, on peut citer la première mention française de Clavulinopsis cinereoides, sur le site en 1997. De même, Erysiphe galeopsidis, Inocybe pallida et Pluteus granulatus sont découverts pour la première fois en région Nord – Pas-de-Calais sur le site en 1997. Sur les 19 espèces déterminantes, une est considérée comme menacée en région (Amanita eliae), 8 sont considérées comme potentiellement menacées (Cantharellus amethystinus, Hygrophorus lindtneri var. carpini, Inocybe pholiotinoides, Inocybe piriodora, Lactarius ruginosus, Lepiota subalba, Mycena crocata et Russula insignis). Malgré la présence d’espèces rares et menacées au plan régional, ce massif présente, sur le plan mycologique, un intérêt inférieur à ce que l’on pouvait en attendre, en fonction de sa position biogéographique et de son relief, engendrant des milieux plus variés que dans d’autres localités régionales. L’évolution de la fonge y semble plutôt régressive et préoccupante (Courtecuisse, R., 1999). Cela devra être confirmé à l'avenir par de nouvelles études.
Périmètre correspondant à la Forêt domaniale de Tournehem-sur-la-Hem associée à ses bois périphériques (bois du Tertre, bois du Carnoy), ainsi qu’à une zone tampon englobant leurs lisières. Réduction du périmètre en 2015 pour exclure les hameaux de "le Héricat" et de "la Ronville".