ZNIEFF 310007286
Platier d’Oye et Plage du Fort Vert

(n° régional : 00000073)

Commentaires généraux

Site exceptionnel d’intérêt européen, tant pour ses particularités géomorphologiques (large estran macrotidal en accrétion avec « plages vertes » et dunes en îlots, dunes calcarifères récentes et dunes paléocôtières correspondant à un cordon dunaire fossile datant du Flandrien…) qu’écologiques (végétations, flore, avifaune…), unique en France et particulièrement représentatif de la poldérisation naturelle ancienne et actuelle de la plaine maritime flamande entre Calais et Dunkerque. La variété des substrats (sables calcarifères, sables décalcifiés, vases…) et la multiplicité des gradients écologiques (microtopographie, salinité, niveaux trophiques) ont en effet induit une très grande diversité floristique et phytocénotique. Le site présente ainsi la plupart des végétations de dunes calcarifères, de marais maritimes et surtout de mares saumâtres typiques de ce rivage, avec différentes communautés végétales à salicornes particulièrement bien représentées au niveau des « plages vertes » (Spergulario mediae - Salicornietum brachystachyae typicum et halimionetosum pedunculatae en particulier), des prairies naturelles à Atropis maritime (Puccinellietum maritimae), des dépressions engorgées avec le Plantagini maritimae - Limonietum vulgaris, des dunes blanches nord-atlantiques de l’Elymo arenarii - Ammophiletum arenariae…

En retrait de cette marge littorale subsistent de nombreuses végétations prairiales subhalophiles à oligohalines dont la répartition et l’agencement dans l’espace seront fonction du niveau de la nappe phréatique (prairie inondable à Scirpe des marais de l’Hydrocotylo vulgaris - Eleocharitetum palustris  , prairie mésophile à Rhinanthe à grandes fleurs du Rhinantho grandiflori - Holcetum lanati...) et de la salinité (Pulicario dysentericae - Juncetum inflexi typicum var. subhalophile…). Plusieurs de ces prairies exploitées par la fauche présentent des combinaisons floristiques tout à fait originales qu’il faudrait rechercher sur des sites similaires.
La mosaïque complexe de communautés végétales halophiles, psammophiles et hygrophiles illustre parfaitement l’originalité du site dont toutes les potentialités écologiques ont pu être exploitées par la végétation et la flore, avec notamment une soixantaine de communautés végétales déterminantes de ZNIEFF recensées à ce jour, soit une richesse et une diversité phytocénotique exceptionnelle.
De même, 119 plantes déterminantes de ZNIEFF ont été observées au sein du périmètre global, dont 23 protégées dans le Nord-Pas de Calais  et neuf protégées au niveau national (Atriplex longipes, Crambe maritima, Halimione pedunculata, Leymus arenarius, Littorella uniflora, Viola saxatilis subsp. curtisii,  Liparis loeselii, taxon inscrit à l’annexe II de la Directive Habitats-Faune-Flore, Lathyrus japonicus subsp. maritimus et  Polygonum raii. Ces trois dernières espèces n’ont cependant pas été revues depuis les années 2000.
L’espèce la plus remarquable est l’Obione pédonculée (Halimione pedunculata), halophyte rarissime en France dont le site héberge l’une des plus importantes stations du nord-ouest de l’Europe. Les deux espèces de Ruppie (Ruppia maritima et R. cirrhosa) abondent certaines années dans les mares de chasses littorales alimentées par l’entrée d’eau de mer. Ce site héberge également la plus importante des deux populations du Statice occidental (Limonium binervosum) à l’échelle de la région Hauts de France, l’espèce ayant été récemment découverte par les gestionnaires.

Cette ZNIEFF abrite 73 espèces déterminantes de faune : cinq espèces d’odonates, cinq espèces d’orthoptères, quatre espèces de rhopalocères, trois espèces de coccinelles, deux espèces d’amphibiens, cinq espèces de mammifères et 49 espèces d’oiseaux.
L’abondance des biotopes amphibies (estran vaso-sableux, vases et prairies salées, végétations rases des dépressions inondables, etc.) est particulièrement favorable à l’avifaune tant nicheuse que migratrice. L'intérêt faunistique du site est essentiellement avifaunistique avec 49 espèces déterminantes d'oiseaux, dont des colonies de laridés d'intérêts régional et national et constituant une part importante de la richesse du site : la principale colonie de Sterne naine est présente sur la Plage du Casino (provenant de la délocalisation de la colonie du Clipon). La Sterne caugek (seul site de nidification pour cette espèce en région) et la Mouette mélanocéphale, sont toutes deux situées au niveau de l’îlot de la sablière. L’estran du Platier d’Oye abrite également une part importante des couples nicheurs de Grand Gravelot et de Gravelot à collier interrompu du Nord – Pas de Calais. Ces espèces sont pour la plupart protégées au niveau européen (Annexe I de la Directive Oiseaux).
De nombreuses vasières occupent la partie ouest du site (ancien estuaire de l’Aa) et font du Platier d’Oye un milieu particulièrement propice au stationnement des limicoles. Le cortège des espèces exploitant les vasières est représenté par le Chevalier gambette en danger critique au niveau du Nord – Pas de Calais (Beaudoin & Camberlein, 2017), qui a niché une fois sur le site, l'Avocette élégante, l'Echasse blanche, L'Huîtrier pie, toutes inscrites à l’annexe I de la Directive oiseaux. Le Hibou des marais est nicheur irrégulier. Les dunes et les zones humides permettent le retour de la Cisticole des joncs et la nidification de nombreuses espèces de fauvettes paludicoles et du Busard des roseaux.
La mise en réserve ornithologique du Platier d’Oye a eu un effet positif sur le nombre d'espèces nicheuses. Le nombre d’espèces nicheuses emblématiques augmente au fur et à mesure des années.
La Sarcelle d'été et le Canard chipeau dont les populations européennes ont subi un déclin important (ROCAMORA & YEATMAN-BERTHELOT, 1999) sont des nicheurs réguliers sur la ZNIEFF.
L'ajout des prairies en 2010 permet d'inclure la totalité du domaine vital des différentes espèces de limicoles et laridés qui, bien que se nourrissant essentiellement sur le littoral, n'en fréquentent pas moins les prairies attenantes.
Situé sur une voie de migration et d'hivernage majeure, le Platier d’Oye et les Hemmes de Marck constituent une halte migratoire importante. En hiver, les prés salés retiennent de nombreux passereaux nordiques : Bruant des neiges, Alouette haussecol, Linotte à bec jaune, Bruant lapon mais également des quantités importantes d’Anatidés et plus particulièrement le Canard siffleur.
Le site abrite également une entomofaune remarquable avec 17 espèces d’insectes déterminantes : cinq espèces d’odonates, cinq espèces d’orthoptères, quatre de rhopalocères et trois de coccinelles.
Les cinq espèces d’odonates déterminantes sont peu communes dans le Nord-Pas de Calais : Aeschne printanière, Leste sauvage, Leste fiancé, Sympétrum jaune et Sympétrum commun (CFR, 2016). Parmi elles, l’Aeschne printanière et le Leste fiancé sont quasi menacés dans la Liste rouge régionale (GON et al., 2012).
Les quatre espèces déterminantes de rhopalocères sont caractéristiques du cortège d’espèces du milieu dunaire. Le Petit nacré et l'Agreste sont assez rares dans le Nord-Pas de Calaisdu fait de leur confinement au cordon littoral (HUBERT & HAUBREUX, 2014).
Les cinq espèces d’Orthoptères déterminantes présentes sur la ZNIEFF peuvent se répartir en deux groupes : les espèces colonisant les pelouses rases et plutôt sèches et les espèces liées aux zones humides. Les espèces du premier groupe sont deux taxons assez rares dans le Nord – Pas de Calais. Le Gomphocère tacheté est confiné au littoral et au bassin minier (CABARET, 2010). La Decticelle chagrinée est un habitant des lieux xériques à végétation clairsemée (BELLMANN et al., 2009, CFR, 2016). Parmi les trois espèces déterminantes d’orthoptères liés aux zones humides se trouve le Conocéphale des roseaux, fortement menacé dans la Liste rouge française pour le domaine némoral (SARDET & DEFAUT, 2004). Cette espèce est inféodée aux hautes végétations de joncs, laîches et graminées (BELLMANN et al., 2009). Le Tétrix des vasières est une espèce assez rare dans le Nord – Pas de Calais mais qui préfère les sablières humides et les vasières. Le Criquet des clairières est assez rare dans le Nord – Pas de Calais. C’est un habitant des lieux humides, tels que prairies humides et bords des fossés (BELLMANN et al., 2009, CFR, 2016).
Les trois espèces déterminantes de coccinelles sont assez rares dans le Nord – Pas de Calais (CFR, 2016).
Deux espèces déterminantes de batraciens sont présentes sur le site : le Crapaud calamite dont les pannes dunaires constituent l'habitat primaire dans la région et le Triton crêté.
Un banc reposoir de Phoques gris et veau-marins se situe sur l'estran et dans la zone autour du phare de Walde.
Les dunes boisées étant privées et l'accès impossible, un manque de connaissance s'y fait donc sentir.

Cette ZNIEFF est concernée par le site de l'inventaire régional du patrimoine géologique n°NPC0002 intitulé « Marais maritime de la Réserve naturelle du Platier d’Oye » de rareté régionale (ex région Nord-Pas de Calais) pour sa géomorphologie.

Commentaires sur la délimitation

Ce périmètre rassemble depuis 2010 les ZNIEFF n°72 « Dune et plage du Fort-Vert » et n°73 « Platier d’Oye » qui présentent de grandes similitudes et des liens étroits sur le plan géomorphologique, sédimentaire et écologique.


Elle s’étend ainsi de l’est de Calais au chenal maritime de l’Aa ; ce regroupement est justifiée par la présence de plusieurs végétations et espèces déterminantes de ZNIEFF associées aux vasières et prés salés situés entre les deux anciennes ZNIEFF.


Deux extensions principales, proposées en 2010, concernent la limite sud du site, en raison de l’existence de plusieurs plans d’eau abritant également des espèces et végétations déterminantes de ZNIEFF. Un réajustement du périmètre a également été nécessaire afin d’inclure les marges de la zone de détente et d’accueil du public de Grand Fort Philippe, entourée de végétations de prés salés, de vasières et bordée d’une pelouse tondue piétinée à la flore originale du fait d’apports de sels par les vents marins.

Cette modification permet de rajouter le Rosier pimprenelle (Rosa spinosissima) à la liste des espèces déterminantes.


En 2010, le périmètre a également été étendu côté mer. L'extension à l'estran et à la zone autour du phare de Walde est motivée par l'inclusion du banc reposoir des Phoques gris et veau-marins. L’estran particulièrement vaste permet le stationnement en grands nombre d’une grande variété de limicoles en hiver. Par ailleurs, cet estran macrotidal joue un rôle majeur dans la dynamique d’accrétion de cette partie du littoral sableux de la plaine maritime flamande.


La zone dite de la lande de Calais, au sud-ouest de la zone, est en cours de recolonisation par la biodiversité suite aux perturbations dues à l'installation d'un camp de migrant et de son démantèlement. Cette zone garde un intérêt certain avec la présence du Crapaud calamite dans la mare ainsi qu'une colonie d'Hirondelle de rivage (29 nids) qui utilise également la zone pour son alimentation.