B1-4 - Laminaires de l'infralittoral inférieur

Typologie nationale des habitats marins benthiques de la Manche, de la Mer du Nord et de l'Atlantique (NatHab-Atl)

Source de l'ajout à la typologie

Dans la version 1 de la typologie (Michez et al., 2013), cet habitat est référencé sous le code et la dénomination R08.05 Laminaires de l’infralittoral inférieur avec trois sous-habitats en fonction de l’espèce de laminaires dominante :
- R08.05.01 Zones à Laminaires clairsemées dominées par Laminaria hyperborea ;
- R08.05.02 Zones à Laminaires clairsemées dominées par Saccharina latissima ;
- R08.05.03 Zones à Laminaires mixtes clairsemées.

Dans la version 2 de la typologie (Michez et al., 2015), les codes et dénominations sont inchangés ; un sous-habitat est ajouté : R08.05.04 Zones à Laminaires clairsemées dominées par Saccorhiza polyschides.

Dans la version 3 de la typologie (Michez et al., 2019), seule la codification est modifiée : R08.05 devient B1-4 Laminaires de l'infralittoral inférieur, avec les 4 sous-habitats :
- B1-4.1 Roches ou blocs infralittoraux à laminaires clairsemées dominées par Laminaria hyperborea
- B1-4.2 Roches ou blocs infralittoraux à laminaires clairsemées dominées par Saccharina latissima
- B1-4.3 Roches ou blocs infralittoraux à laminaires clairsemées mixtes
- B1-4.4 Roches ou blocs infralittoraux à laminaires clairsemées dominées par Saccorhiza polyschides
Aucun ajout n’a été fait.

Facteurs abiotiques

Etage : Infralittoral
Nature du substrat : Roche, galets
Répartition bathymétrique : 1-33m [sur la façade Manche-Atlantique]
Hydrodynamisme : Variable
Salinité : Milieu marin
Température : Cyclotherme saisonnier
Lumière : Système phytal
Régime trophique : Oligotrophe, Mésotrophe

Caractéristiques stationnelles

L’habitat B1-4 Laminaires de l’infralittoral inférieur est largement réparti dans les zones rocheuses qui regroupent les conditions abiotiques favorables aux laminaires recevant une quantité de lumière insuffisante pour les habitats équivalents de l’infralittoral supérieur (B1-3). En fonction de ces mêmes conditions, la composition spécifique de l’habitat varie, permettant de distinguer plusieurs sous-habitats. Cet habitat se caractérise par la présence des laminaires en faible densité, toujours inférieure à 3 individus au mètre carré (même localement ; Derrien-Courtel et al., 2013). Cet habitat peut être monospécifique (population pure) ou mixte. Il représente une transition entre l’habitat Laminaires de l’infralittoral supérieur (B1-3) et les habitats des roches ou blocs du circalittoral côtier (C1).

Variabilité

L’habitat à laminaires de l'infralittoral inférieur va se décliner différemment en fonction des facteurs abiotiques, principalement la température, la turbidité, l’hydrodynamisme et l’influence sédimentaire. En fonction de ces paramètres, sa composition floristique va varier selon des gradients latitudinaux et bathymétriques, mais aussi selon les conditions locales. Les sous-habitats de niveau trois sont décrits sur leur page INPN respective.

Communautés ou espèces caractéristiques

L’habitat B1-4 peut-être caractérisé par la présence de différentes espèces de laminaires structurantes : Laminaria hyperborea, Saccorhiza polyschides, Saccharina latissima et Laminaria ochroleuca. Chaque espèce définit généralement un sous-habitat.

Dynamique temporelle

Si la majorité des laminaires sont pérennes, Saccorhiza polyschides est une espèce annuelle et opportuniste ; sa présence peut donc varier selon les années. Plus globalement, l’ensemble de ces sous-habitats sont définis selon un critère de densité des individus qui peut varier d’une année sur l’autre. Ainsi, cet habitat B1-4 de transition avec l’étage circalittoral peut voir sa répartition bathymétrique modifiée selon les années, voire même disparaître au profit d’une transition directe entre les habitats de l’infralittoral supérieur et ceux du circalittoral côtier.

Habitats pouvant être associés ou en contact

Cet habitat est principalement en contact avec d’autres habitats du même niveau :
- B1-5 Roches ou blocs infralittoraux à couverture végétale autre que les laminaires
- B1-6 Roches ou blocs infralittoraux à dominance animale
- B1-7 Tombant de l'infralittoral
- B1-9 Grottes marines, surplombs et autres microhabitats à biocénose sciaphile infralittoraux

D’autre part, cet habitat est généralement en continuité bathymétrique avec :
- B1-3 Laminaires de l'infralittoral supérieur (au-dessus)
- C1-1 Roches ou blocs circalittoraux côtiers à gorgonaires, Pentapora fascialis et algues sciaphiles (en dessous)

Confusions possibles

Cet habitat peut être confondu avec son équivalent de l’infralittoral supérieur (B1-3) en raison de difficultés d’interprétation du critère de densité qui les distingue. Les espèces définissant les sous-habitats se distinguent assez facilement en dehors des jeunes individus. Cependant, il n’est pas rare de trouver uniquement de petits individus dans cet habitat ; aussi, il peut être délicat de définir précisément le sous-habitat.

Fonctions écologiques

En raison de la petite taille et de la faible densité des laminaires, les fonctions écologiques sont fortement réduites par rapport à l’habitat équivalent de l’infralittoral supérieur (B1-3). Cet habitat et ses sous-habitats ne permettent pas la mise en place d’une canopée jouant le rôle d’abris vis-à-vis des prédateurs. La colonisation des stipes est également faible. Enfin, la production et l’exportation de matière organique sont nettement diminuées par rapport à l’infralittoral supérieur.

Statut de conservation

Au titre de la DHFF (92/43/CEE), cet habitat est inclus dans l’Habitat d’Intérêt Communautaire (HIC) 1170 « Récifs ». Il peut également correspondre à l’HIC 1130 « Estuaires », à l’HIC 1150 « Lagunes côtières » ou à l’HIC 1160 « Grandes criques et baies peu profondes » sous réserve de respect des critères d'identification géomorphologiques et de délimitation physiographiques de l'HIC.

Tendance évolutive

Dans certains secteurs de la façade Manche-Atlantique, l’habitat à laminaires de l'infralittoral supérieur a semble-t-il nettement régressé ; localement, on peut citer le cas du secteur Loire-Baie de Vilaine (Association ELV, 2020) ou de la Baie des Veys (Cosson, 1999). Par ailleurs et depuis plusieurs années, une corrélation semble possible entre l’extension en profondeur des forêts de laminaires et l'indice NAO (Derrien-Courtel, com. pers.).
Plus globalement, une étude européenne a montré qu’une tendance générale à la diminution de l'abondance de certaines espèces en limite sud de répartition et à l’augmentation de leur abondance dans d'autres zones géographiques de leur distribution (Saccharina latissima et Saccorhiza polyschides) a été enregistrée ces dernières années. L'expansion de l'espèce introduite Undaria pinnatifida a également été enregistrée (Araújo et al., 2016).
Une seconde étude, mondiale, menée sur 34 régions, via 1138 sites suivis au cours des 50 dernières années montre notamment que nous ne sommes pas en mesure de comprendre comment le changement global affectera les taxons distribués mondialement, sans comprendre comment les facteurs de stress globaux interagissent avec les pressions anthropiques locales et les conditions environnementales. Les scientifiques suggèrent aussi que cette variabilité reflète de grandes différences régionales dans les facteurs de changement environnemental local et que les facteurs globaux associés au changement climatique varient selon la région, les espèces de laminaires, les conditions environnementales locales et d'autres sources de stress. Cela contraste avec beaucoup d'autres espèces (comme les coraux et les herbiers) dont les abondances sont en déclin à l'échelle mondiale. On pense que cette différence est probablement due en partie à la très grande capacité des laminaires à se remettre rapidement des perturbations auxquelles elles sont soumises. Elles sont dotées d’une incroyable résilience ; aussi, leur déclin doit être considéré comme un signe de basculement des plus inquiétants. Les résultats soulignent l'importance et la possibilité de gérer les forêts de laminaires à l'échelle locale. En effet, les régions où les déclins ont été documentés étaient souvent celles qui subissaient de multiples facteurs de stress locaux et mondiaux agissant ensemble pour nuire à ces habitats. Ceux-ci incluaient parfois la combinaison de l’exploitation et du changement climatique (Krumhansl et al., 2016).
Peu de données existent mais une tendance à l’ensablement a été observée localement au niveau de certains champs de blocs (Bajjouk et al., 2015). Un changement d’hydrodynamisme peut modifier la tendance évolutive des champs de laminaires également, même dans les premiers mètres de l’infralittoral supérieur ; cette modification dans le mode d’exposition est observée depuis de nombreuses années déjà sur la façade Manche-Atlantique et le littoral breton en particulier (Derrien-Courtel et Ar Gall, com. pers.).
Enfin, des dégradations ont pu être observées localement, liées aux impacts des activités anthropiques (eutrophisation, aménagements littoraux, extraction de granulats marins et clapages de boues au large) surtout dans des milieux fermés (Derrien-Courtel et al., 2008, 2014a). Elles peuvent constituer une source chronique de turbidité plus ou moins localisée selon l’étendue de la zone concernée et selon les courants.

Auteur(s)

Le Gal A., Decaris F.-X., Derrien-Courtel S., Derrien R.

Date de rédaction

2020

Bibliographie

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 Michez N., Thiébaut E., Dubois S., Le Gall L., Dauvin J.C., Andersen A. C., Baffreau A., Bajjouk T., Blanchet H., de Bettignies T., de Casamajor M.-N., Derrien-Courtel S., Houbin C., Janson A.L., La Rivière M., Lévèque L., Menot L., Sauriau P.G., Simon N., Viard F., 2019. Typologie des habitats marins benthiques de la Manche, de la Mer du Nord et de l’Atlantique. Version 3. UMS PatriNat, Muséum national d'Histoire naturelle, Paris, 52 p. (Source)

Araújo R.-M., Assis J., Aguillar R., Airoldi L., Bárbara I., Bartsch I., Bekkby T., Christie H., Davoult D., Derrien-Courtel S., Fernandez C., Fredriksen S., Gevaert F., Gundersen H., Le Gal A., Lévêque L., Mieszkowska N., Norderhaug K. M., Oliveira P., Puente A., Rico J. M., Rinde E., Schubert H., Strain E.M., Valero M., Viard F. & Sousa-Pinto I., 2016. Status, trends and drivers of kelp forests in europe: An expert assessment. Biodiversity and Conservation, 25(7): 1319-1348. 10.1007/s10531-016-1141-7

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Guillaumont B., Bajjouk T., Rollet C., Hily C., Gentil, F., 2008. Typologie d’habitats marins benthiques : analyse de l’existant et propositions pour la cartographie - Habitats côtiers de la région Bretagne - Note de synthèse. Projets REBENT-Bretagne et Natura-Bretagne. RST/IFREMER/DYNECO/AG/08-06/REBENT. 16p + Annexes.

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