III.6.1.b. - Association à Ericaria crinita (Syn. Cystoseira crinita), Cystoseira foeniculacea (Syn. C. discors) et Cystoseira compressa / C. crinitophylla 

Typologie nationale des biocénoses benthiques de Méditerranée (NatHab-Med)

Evolution

ATTENTION : L’évolution de la taxonomie a mené à une modification du nom d’une espèce caractéristique (Ericaria crinita (Duby) Molinari & Guiry 2020). L’association à Cystoseira crinita, C. foeniculacea (Syn. C. discors) et C. compressa / C. crinitophylla devrait ainsi être renommée comme « Association à Ericaria crinita (Syn. Cystoseira crinita), Cystoseira foeniculacea (Syn. C. discors) et Cystoseira compressa / C. crinitophylla ».

Facteurs abiotiques

Etage : Infralittoral
Nature du substrat : Fonds durs
Répartition bathymétrique : de 1 à 2 mètre de profondeur
Situation : Mer ouverte
Hydrodynamisme : Mode calme (Cystoseira compressa, espèce opportuniste, peut parfois se trouver avec Ericaria amentacea (Syn. Cystoseira amentacea) dans un mode semi agité)
Salinité : 37-38
Température : Variations saisonnières et journalières
Lumière : Forte luminosité
Régime trophique : Oligotrophe

Caractéristiques stationnelles

En Méditerranée occidentale, cette association se trouve dans des biotopes photophiles superficiels et plutôt dans les endroits où l’hydrodynamisme est modéré (fonds de baies). Elle a été décrite pour la première fois en Corse par Molinier (au Cap Corse). En Méditerranée française, lorsque les conditions sont favorables. Ericaria crinita (Syn. Cystoseira crinita), C. foeniculacea et C. compressa peuvent former des ceintures denses de 1 à 2 mètres de large.
Ericaria crinita (Syn. Cystoseira crinita) forme le Cystoseiretum crinitae Molinier 1958 qui se développe dans le haut de l’infralittoral à proximité de la surface dans les zones abritées avec une très forte luminosité et des températures élevées en été (Thibaut et al., 2015). Elle peut résister à un recouvrement temporaire par des feuilles mortes de Posidonia oceanica. Cystoseira crinitophylla tend à remplacer Ericaria crinita dans le sud de la Méditerranée et dans l’Adriatique.
Les deux formes de Cystoseira foeniculacea (f. tenuiramosa et f. foeniculacea) se rencontrent également en zones abritées au niveau du premier mètre (parfois dans les cuvettes) (Thibaut et al., 2015).
Cystoseira compressa subsp. compressa est une espèce tolérante qui peut se rencontrer dans le haut de l’infralittoral, entre la surface et 15 m environ de profondeur, à la fois en modes exposé et abrité, dans des eaux pristines à modérément polluées. Certains individus ont été observés jusqu’à 40 m de profondeur (Thibaut et al., 2015). Cystoseira compressa subsp. pustulata se rencontre dans le haut de l’infralittoral et dans des cuvettes (Thibaut et al., 2015).

Variabilité

Le Cystoseiretosum compressae, sous-association du Cystoseiretum crinitae, a été décrite par Molinier (1958) comme un faciès appauvri en mode relativement calme et en milieu légèrement pollué.

Dynamique

Les Cystoseira sont pérennes (hémi-pérennes : la base encroûtante et les axes persistent au cours de la vie de la plante). Les rameaux tombent chaque année. La durée de vie de ces espèces est inconnue.
En cas de perturbation, l’association à C. crinita, C. foeniculacea et C. crinitophylla est remplacée soit par l’association à Padina pavonica, Dictyotales, Halopteris scoparia (Syn. Stypocaulon scoparium) et Laurencia spp. / Anadyomene stellata (III.6.1.k.), par l’association à Cladostephus spongiosum (Syn. C. hirsutus) et Dasycladus vermicularis (III.6.1.n.) ou par un faciès de surpâturage à algues calcaires encroûtantes et oursins (III.6.1.x.). Au niveau de la presqu’île de Giens dans le Var, C. crinita est remplacée par une association à Halopithys incurva et Digenea simplex (III.6.1.j.). Cystoseira compressa peut remplacer les autres espèces initialement identifiées comme appartenant au genre Cystoseira y compris Ericaria amentacea (Syn. Cystoseira amentacea)

Espèces caractéristiques

Les espèces caractéristiques sont : Anadyomene stellata, Cladostephus spongiosum f. verticillatus, Cystoseira compressa, Ericaria crinita (Syn. Cystoseira crinita), Cystoseira crinitophylla, Cystoseira elegans, Cystoseira foeniculacea, Dasycladus vermicularis, Dictyota fasciola, Erythrocystis montagnei, Halopteris scoparia (Syn. Stypocaulon scoparium), Herposiphonia secunda, Liagora viscida, Mesogloia vermiculata, Padina pavonica, Sphacelaria cirrosa, Alsidium helminthochorton, Chylocladia verticillata, Dipterosiphonia rigens, Jania virgatum et Jania rubens var. corniculata.

Principaux critères de reconnaissance

Forêt de Ericaria crinita (Syn. Cystoseira crinita), C. foeniculacea, C. compressa ou C. crinitophylla.
Ericaria crinita (Syn. Cystoseira crinita) est une algue cespiteuse, non épineuse, dépourvue de tophules et généralement d'aérocystes. Les axes principaux sont longs (10-30 cm), nus, noirs, à apex saillants et épineux. Des bouquets de rameaux adventifs sont disposés latéralement sur les axes. Les réceptacles sont terminaux, compacts, bosselés, cylindriques ou ovales. En été, il ne reste que sa partie basale et les axes. Cystoseira crinitophylla se distingue de C. crinita par la présence de courts ramules épineux sur les rameaux.
Les axes de Cystoseira foeniculacea sont muriculés (couverts d’épines courtes et simples), ses branches primaires sont à contour pyramidal.
Cystoseira compressa est une algue cespiteuse dont les axes principaux sont très courts (1 cm) et nus avec un apex lisse. Ils produisent des rameaux plus ou moins compressés à ramules opposés à alternes disposés dans un plan. Elle ne possède ni tophules ni épines. Elle peut présenter des aérocystes. Les réceptacles sont terminaux, compacts et cylindriques. L'apparence des rameaux est très variable et dépend de l'hydrodynamisme et de la saison : en mode calme, ils sont très allongés, et, en mode exposé, ils sont courts et prennent une forme en rosette (disposition en étoile).

Habitats associés ou en contact

Au-dessus, la biocénose de la roche médiolittorale inférieure (RMI) (II.4.2.).
En-dessous, d’autres aspects de la biocénose des algues infralittorales (III.6.1.) ou la biocénose de l'herbier à Posidonia oceanica (III.5.1.).

Confusions possibles

Aucune.

Répartition géographique

En Languedoc-Roussillon, Carpodesmia crinita est éteinte sur la côte des Albères et presque éteinte au Cap d’Agde. Elle est rarissime dans les Bouches-du-Rhône où seulement deux populations de quelques mètres carrés subsistent sur la Côte Bleue (Carry le Rouet). Elle est fréquente le long des côtes du Var et commune en Corse. Enfin, dans les Alpes-Maritimes, elle a disparu dans la majorité des localisations historiques. Seuls quelques individus se maintiennent (Thibaut et al., 2015).
C. foeniculacea (f. tenuiramosa et f. foeniculacea) a disparu de la région de Banyuls. Dans les Bouches-du-Rhône son statut de présence n’est pas connu. Elle est rare dans le Var ainsi qu’en Corse.
Dans les Alpes-Maritimes, elle n’est plus présente sur la totalité des localisations historiques hormis dans un site (pointe de l’Ilette). De plus, un individu isolé a été observé sur l’île Sainte-Marguerite et une seule population dense a été trouvée dans une cuvette de quelques mètres carré au cap d’Antibes (Thibaut et al., 2015).
C. compressa subsp. compressa est moins commune actuellement qu’auparavant mais elle reste la plus commune des fucales présentes Dans les Alpes-Maritimes (Thibaut et al., 2015). On la retrouve partout en Méditerranée même au Cap d’Agde où elle est très commune. Dans les Alpes maritimes, C. compressa subsp. pustulata est signalée sur 3 sites (Cannes, Antibes et La pointe Colombier à Saint-Jean-Cap-Ferrat) (Thibaut et al., 2015). Elle n’a jamais été vue dans la région de Banyuls. Elle n’est pas présente dans les Bouches-du-Rhône. Elle est fréquente dans la Var ainsi qu’en Corse.
C. crinitophylla a été signalée une fois en Corse dans l’archipel des Lavezzi.

Structure et fonctions

Structure : forêt algale/peuplements arborescents
Fonctions : nurseries, production primaire

Intérêt pour la conservation

Cette association, comprenant plusieurs strates, est caractérisée par une richesse spécifique élevée; elle abrite des organismes épiphytes et des organismes de sous strate. On y trouve des espèces appartenant principalement aux algues, polychètes, mollusques et crustacés.

Menaces potentielles

Les menaces sont :
- le surpâturage par les oursins
- la destruction de l’habitat

Tendance évolutive

L’association est globalement en déclin, hormis C. compressa dont la tendance est à l’extension.
Thibaut et al. (2012) précise que pour C. crinita en particulier, à l’exception des travaux effectués à Port-Cros et en Corse où elle est encore abondante, cette espèce a été peu cartographiée le long du littoral français. Dans le sud-ouest, elle a disparu de la côte des Albères. En PACA, elle est encore abondante dans la zone Natura 2000 dite des « des Trois Caps » et à Saint-Tropez. L’espèce est également commune en Corse. Sur le reste du littoral C. crinita est devenue très rare et ne se rencontre plus que dans certaines cuvettes littorales. Elle a notamment régressé à cause du pâturage excessif (surpâturage) de l’oursin comestible Paracentrotus lividus. C. crinita est en net déclin sur la côte continentale. En conclusion, dans les Alpes-Maritimes et dans les Bouches-du-Rhône, l’association à C. crinita peut être considérée comme fonctionnellement éteinte, les populations sont très fragmentées et ont très fortement décliné (Thibaut et al., 2015).
L’association à C. foeniculacea f. tenuiramosa peut être considérée comme fonctionnellement éteinte dans les Alpes-Maritimes (Thibaut et al., 2015).
L’espèce Cystoseira elegans qui peut être présente au sein de cette association, peut être considérée comme éteinte dans les Alpes-Maritimes car elle n’a pas été observée lors des dernières campagnes (Thibaut et al., 2015).

Auteur(s)

Michez M., Thibaut T., Verlaque M.

Date de rédaction

2016

Bibliographie

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