8130-2 - Éboulis calcaires collinéens à montagnards à éléments moyens et gros, du Jura

Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats

Caractéristiques stationnelles

De l’étage collinéen à la base du subalpin.
Inféodé aux versants exposés au sud et au sud-ouest.
Substrat calcaire constitué de blocs et de cailloux de taille assez grosse ; la terre fine est riche en carbonate de calcium (pH oscillant entre 7,9 et 8,6).
Terre fine pauvre en humus (teneur moyenne ne dépassant pas 4 %).

Variabilité

Cet habitat présente une variabilité qui repose sur la taille des éléments rocheux et permet de distinguer trois types de communautés.

Communauté à Galéopsis à feuilles étroites (Galeopsis angustifolia) [Galeopsietum angustifoliae] : pauvre en espèces, présente dans des éboulis encore mobiles dont les éléments sont souvent moins grossiers que dans le type suivant, et la terre fine interstitielle plus abondante. Cette communauté est souvent localisée aux loupes d’arrachement et aux zones plus mobiles du pierrier.

Communauté à Vélar blanc-jaunâtre et (Erysimum ochroleucum) Centranthe à feuilles étroites (Centranthus angustifolius) [Erysimo decumbentis-Centranthetum angustifoliae] : s’installe sur les éboulis grossiers, pauvres en terre fine. Selon le caractère des matériaux, on y observe divers faciès :
- à Vélar blanc jaunâtre sur les parties peu mobiles et riches en éléments grossiers ;
- à Centranthe à feuilles étroites sur les éboulis pauvres en éléments fins entre les blocs ;
- à Rumex à écussons (Rumex scutatus) dans les parties les plus grossières et les plus mouvantes ;
- à Calamagrostide argentée (Achnatherum calamagrostis) en conditions moyennes.

Communauté à Silène des glariers et Ibéris de Contejean (Iberis linifolia subsp. intermedia, incluant Iberis contejanii) [Iberidetum intermediae fo. contejanii], sur éléments relativement grossiers.

Physionomie, structure

La végétation ne couvre que 8 à 25 % de la surface du pierrier et est composée de plantes calcaricoles surtout et neutrophiles, xérophiles à xéroclines, liées à ces conditions. Les chaméphytes sont nombreux (suffrutescents, rampants, succulents) ainsi que les hémicryptophytes (cespiteux ou dressés).
Le Rumex à écussons forme des taches vert pâle dans les parties les plus grossières de l’éboulis (longs rhizomes fragiles).
Le Vélar blanc-jaunâtre est pourvu d’une forte racine pivotante, profondément ancrée dans les blocailles (tiges nombreuses et très vigoureuses).
Le Centranthe à feuilles étroites possède une racine s’enfonçant profondément, émettant de nombreuses ramifications au niveau de la terre fine (rôle important dans la stabilisation).
Le Gaillet à feuilles d’asperge sauvage (Galium corrudifolium) se présente en touffes, le chevelu abondant de radicelles emprisonne les particules les plus fines.
Le Scrophulaire du Jura (Scrophularia canina subsp. juratensis) possède un très fort enracinement (60 cm à 100 cm), se ramifiant au niveau de la terre fine.

Confusions possibles

Il est possible de confondre cet habitat avec les éboulis calcaires montagnard à subalpin très grossiers à Polystic en lance (Polystichum lonchitis), Dryoptéris de Villars (Dryopteris villarii), Gymnocarpium herbe-à-Robert (Gymnocarpium robertianum) [Dryopteridion submontanae ; Code UE : 8120] ou avec les éboulis plus fins, du collinéen, à Liondent des éboulis (Leontodon hyoseroides) [Leontodion hyoseroides ; Code UE : 8160*].

Dynamique

Habitat dont l’évolution est très lente, surtout lorsque l’éboulis continue à être actif, avec approvisionnement constant à partir de rochers ou de falaises s’altérant, ou à partir d’un gros stock de blocs s’écoulant peu à peu.
Après installation de la végétation pionnière spécialisée de l’éboulis, qui contribue à une première stabilisation du pierrier, deux modes d’évolution s’observent en fonction de l’altitude des stations.
À l’étage collinéen :
- installation directe d’arbustes [Buis (Buxus sempervirens), Nerprun des Alpes (Rhamnus alpina), Cornouiller sanguin (Cornus sanguinea), Viorne lantane (Viburnum lantana)], puis Noisetier (Corylus avellana) ;
- densification permettant peu à peu en basse altitude l’arrivée du Chêne pubescent (Quercus humilis).
À l’étage montagnard :
- installation d’espèces herbacées de pelouses (se trouvant au voisinage) : Fétuques, Brome dressé, Seslérie bleuâtre (Sesleria caerulea), Brachypode penné (Brachypodium pinnatum) qui contribuent à la fixation totale de l’éboulis.
Cf. schéma du cahier d'habitat.

Habitats associés ou en contact

Il est possible d’observer au sein de l’éboulis ou sur les marges :
- des végétations de dalles rocheuses sur blocs horizontaux (Code UE : 6110*) ;
- des habitats de fentes de rochers sur les gros blocs plus ou moins stabilisés [Code UE : 8210] ;
- des pelouses mésoxérophiles à xérophiles dominées par le Brome dressé [Code Corine : 34.3328] ou la Seslérie bleuâtre [Code UE : 6170] ;
- des fruticées à Buis [Code UE : 5110] et au contact de diverses espèces xéroclines ;
- des chênaies pubescentes [Code Corine : 47.71], des hêtraies sèches calcicoles [Code UE : 9150].

Répartition géographique

La communauté à Vélar blanc-jaunâtre et Centranthe à feuilles étroites est répandue dans le Jura méridional (et le Jura central), elle est à localiser avec précision sur les Préalpes calcaires du Nord.
La communauté à Galéopsis à feuilles étroites occupe la même aire, mais se retrouve aussi, plus au nord sur substrat calcaire.
La communauté à Ibéris intermédiaire est répandue dans le Jura (climat continental très océanique).

Valeur écologique et biologique

Ce type d’habitat est assez rare et couvre des surfaces assez réduites. En outre, certaines espèces végétales présentent un intérêt régional (Linaria alpina var. petraea, Scrophularia canina subsp. juratensis...). Il héberge également quelques espèces animales d’intérêt patrimonial, notamment :
- l’Apollon (Parnasius apollo), protégé au niveau national et inscrit à l’annexe IV de la directive « Habitats » ;
- le Merle de roche (Monticola saxatilis) protégé au niveau national.

États de conservation

États à privilégier :
Les éboulis encore actifs (où les matériaux continuent à migrer sur les pentes), avec un recouvrement faible des espèces pionnières d’éboulis.

Tendances et menaces

Cet habitat est globalement peu menacé.
Toutefois, un certain nombre de menaces directes de destruction partielle ou totale existent. On peut retenir entre autre :
- menaces liées à certains projets de desserte forestière pouvant traverser ce type d’habitat (ceci est parfois le cas sur la Haute-Chaîne du Jura) ;
- menaces de dégradation de cet habitat suite au passage de bovins ou ovins et création de gradins de sentiers ou piétinement sur des zones plus larges par les moutons ; ce type de menace concerne les pierriers proches des zones de pelouses d’alpage ou des pierriers situés sur les parcours du bétail ;
- dégradations liées à la surfréquentation du Chamois ;
- menaces possibles de dégradation de l’habitat par le passage de sentiers de randonnée pédestre.

Axes de recherche

Préciser l’aire de répartition des communautés, notamment celle à Vélar et Centranthe dans les Préalpes calcaires.
Placettes permanentes pour étudier la dynamique de la végétation.

Fiche du cahier d'habitats (format pdf)
Bibliographie

 Bensettiti F., Herard-Logereau K., Van Es J. & Balmain C. (coord.), 2004. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 5 - Habitats rocheux. MEDD/MAAPAR/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 381 p. + cédérom. (Source)