Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats
Habitat de superficie variable s’étageant de l’étage subalpin supérieur à l’étage alpin.
Il colonise les pierriers siliceux (schisteux, granitiques) constitués d’éléments relativement fins à plus grossiers, fixés à mobiles, de pente faible à moyenne, de moraines glaciaires et d’éboulis de gravité.
L’habitat est préférentiellement exposé du nord-ouest au nord-est aux plus basses altitudes, mais peut également se développer en soulane à plus haute altitude. Le microclimat régnant au sein de l’habitat est rude, très contrasté, en dehors d’une longue période d’enneigement au cours de laquelle une protection est assurée par le manteau neigeux.
Une couche souvent peu épaisse (5 à 10 cm) de plaquettes schisteuses peut, soit recouvrir des blocs morainiques granitiques hétérométriques ennoyés dans une matrice sablo-limoneuse, soit recouvrir une matrice de fractions fines de pH acide (4,5 à 6) située à faible profondeur sous les débris rocheux et pouvant subir le gel. Ces matrices favorisent l’enracinement des végétaux.
Malgré une apparente variabilité floristique due au gradient altitudinal, à la variation d’exposition et au type de pierrier, l’habitat correspond à l’association à Cryptogramme crispé et Pâturin du Mont Cenis (Poa cenisia = P. fontqueri) [Allosuro crispi-Poetum fontquerii]. Elle est caractérisée en outre par : Coincye des montagnes (Coincya cheiranthos subsp. montana), Séneçon des Pyrénées (Senecio pyrenaicus), Dryoptéris des montagnes (Dryopteris oreades), avec pour les types les plus alticoles : Orpin des Alpes (Sedum alpestre), Arméria des Alpes (Armeria alpina), Céraiste des Alpes (Cerastium alpinum), Leucanthémopsis des Alpes (Leucanthemopsis alpina)…
Végétation en général très ouverte dont le recouvrement maximal peut atteindre 70 %.
La flore est relativement pauvre, composée essentiellement d’hémicryptophytes et comptant également quelques géophytes et chaméphytes, pour les phanérogames.
Étant donné l’écologie particulière de l’habitat, les espèces se montrent très nettement spécialisées aux contraintes du milieu (nature, granulométrie, mobilité, microclimat, phénomènes cryonivaux…). Ces espèces lithophiles présentent diverses stratégies leur permettant de résister aux contraintes imposées par les mouvements éventuels se produisant au sein de la matrice et des pierriers et entraînant des traumatismes. L’organisation morphologique et anatomique de leur système végétatif (notamment souterrain) permet à ces espèces lithophiles de suivre et de subir, ou non, le mouvement des pierriers, d’où les diverses stratégies distinguées :
- stratégie migratrice : lithophytes migrateurs par allongement et régénération [Crépide naine (Crepis pygmaea), Gaillet à racines chevelues (Galium cometerrhizon), Pâturin du Mont Cenis], lithophytes migrateurs à système racinaire adhérant fortement au substrat [Séneçon des Pyrénées (Senecio pyrenaicus), Fétuque des glaciers (Festuca glacialis)] ;
- stratégie sédentaire : lithophytes édificateurs à système aérien stabilisateur (Leucanthémopsis des Alpes).
Les éboulis siliceux montagnards et subalpins, des situations fraîches, à éléments gros des Pyrénées [Cryptogrammo crispae-Dryopteridetum oreadis ; Code UE : 8110].
Les éboulis siliceux subalpins des stations sèches [Galeopsion pyrenaicae ; Code UE : 8110].
Les éboulis schisteux des Pyrénées à Pensée de Lapeyrouse (Viola diversifolia) [Violetum diversifoliae ; Code UE : 8130].
Les éboulis siliceux subalpins et alpins thermophiles à Oxyria à deux styles (Oxyria digyna) et Doronic des Pyrénées (Doronicum grandiflorum subsp. pyrenaicum) [Oxyrio digynae- Doronicetum pyrenaici, Code UE : 8130].
Cet habitat provient de la colonisation de pierriers siliceux (moraines et éboulis de gravité) peu ou très mobiles, à la stabilisation desquels il contribue. Il est relativement permanent tant qu’un équilibre s’établit entre les processus géomorphologiques (mobilité, phénomènes cryonivaux…) remaniant le milieu et la colonisation par les espèces végétales lithophiles spécialisées.
Par consolidation, l’habitat peut conduire, selon l’altitude, à la pelouse à Gispet (Festuca eskia) [Festucion eskiae ; Code UE : 6140], à la pelouse à Laîche courbe (Carex curvula) [Festucion supinae ; Code Corine : 36.34], à la nardaie [Nardion strictae ; Code UE : 6230], ou à la lande à Rhododendron ferrugineux (Rhododendron ferrugineum) [Rhododendron-Vaccinion ; Code UE : 4060].
Végétation chasmophytique des pentes rocheuses sous-types siliceux [Androsacion vandellii ; Code UE : 8220].
Pelouses siliceuses héliophiles à Gispet (Festuca eskia) [Festucion eskiae ; Code UE : 6140].
Pelouses silicicoles alpines à Laîche courbe [Festucion supinae ; Code Corine : 36.34].
Pelouses acidophiles à Nard raide (Nardus stricta) [Nardion strictae ; Code UE : 6230*].
Landes acidophiles à Rhododendron ferrugineux [Rhododendro-Vaccinion ; Code UE : 4060].
Association endémique de la partie centrale siliceuse des Pyrénées.
Habitat endémique des Pyrénées centrales de grande valeur écologique et biologique par les conditions très particulières du milieu et le nombre d’espèces spécialisées (voir types biologiques et stratégies dans le paragraphe « Physionomie, structure ») qu’il renferme. Le cortège floristique compte quelques espèces endémiques : pyrénéenne, comme le Séneçon des Pyrénées, et pyrénéo-corse, comme le Gaillet à racines chevelues.
Il constitue le biotope de prédilection de mammifères comme le Campagnol des neiges (Chionomys nivalis) et l’Hermine (Mustela hermina). Une lacune persiste dans la connaissance de la faune associée à ce type d’habitat (faune du milieu souterrain superficiel notamment).
États à privilégier :
Stade optimal de l’habitat.
Autres états observables :
Phases initiales et stades en voie d’évolution vers des pelouses ou des landes.
L’habitat n’apparaît pas globalement menacé dans les Pyrénées. Toutefois, des menaces de destruction directe (création de pistes et routes, aménagement et extension de domaines skiables, piétinement et pâturage intensifs par les troupeaux, piétinement et bouleversement lors de randonnées, cueillette, érosion…) et indirecte (dynamique naturelle faisant évoluer l’habitat vers des stades de pelouses, changement climatique global éventuel…) existent.
Affiner la typologie syntaxonomique de l’habitat et en réaliser l’inventaire cartographique.
Étudier la faune associée.
Il serait intéressant de faire un suivi à long terme de cet habitat afin de connaître son évolution éventuelle lors d’un changement climatique global.
Bensettiti F., Herard-Logereau K., Van Es J. & Balmain C. (coord.), 2004. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 5 - Habitats rocheux. MEDD/MAAPAR/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 381 p. + cédérom. (Source)