8210-12 - Falaises calcaires subalpines à alpines, des Alpes

Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats

Caractéristiques stationnelles

Étages subalpin et alpin.
À toutes les expositions aux étages montagnard et subalpin, principalement aux expositions chaudes à l’étage alpin.
Se développe sur des parois subverticales, dépourvues en permanence de neige et soumises à de fortes variations thermiques annuelles et journalières.
La plus grande perméabilité des roches calcaires entraîne une sécheresse plus intense qu’en falaises siliceuses.
La très forte déclivité et le ruissellement intense entraînent un rajeunissement fréquent de la paroi s’opposant à l’édification d’un sol proprement dit. C’est seulement au niveau des fissures et des replats que peuvent se développer des fragments de lithosol (mélange de minéraux et d’humus noir de type mull).

Variabilité

Variations altitudinales :
Optimum à l’étage subalpin avec variations géographiques : partie méridionale des Alpes cottiennes (Alpes-de-Haute-Provence) et extrémité occidentale des Alpes-Maritimes : falaises à Raiponce de Charmeil et Buplèvre des rochers [Phyteumo charmelii-Bupleuretum petraeae] ;
- Alpes cottiennes (Alpes-de-Haute-Provence) : falaises à Potentille à tiges courtes et Saxifrage fausse diapensie [Potentillo caulescentis-Saxifragetum diapensoidis]. Cette association forme la transition entre l’association à Raiponce de Charmeil et Buplèvre des rochers des Alpes-Maritimes et des Alpes-de-Haute-Provence et l’association à Avoine à feuilles fines et Buplèvre des rochers des Préalpes du Dauphiné ;
- Préalpes du Dauphiné : falaises à Avoine à feuilles fines et Buplèvre des rochers [Bupleuro petraeae-Avenetum setaceae];
- massif de la Grande Chartreuse : falaises à Potentille luisante (Potentilla nitida) et Millepertuis nummulaire (Hypericum nummularium) (forme non décrite par la phytosociologie).
Optimum à l’étage alpin (subnival) avec variations géographiques :
- Alpes du Nord : falaises à Androsace de Suisse [Androsacetum helveticae], avec en plus : Androsace pubescente (Androsace pubescens), Genépi des glaciers (Artemisia glacialis), Pétrocallis des Pyrénées (Petrocallis pyrenaica), Drave tomenteuse (Draba tomentosa) ;
- Alpes du Sud : falaises à Primevère marginée et Valériane saliunca [Primulo marginatae-Valerianetum saliuncae], avec en plus : Androsace pubescente, Drave des frimas (Draba dubia), Genépi des glaciers, Genépi noir.

Variations selon le type de substrat :
Forme sur grès d’Annot, décrite pour les falaises du subalpin, marquée par un enrichissement en espèces des habitats de falaises siliceuses de l’Androsacion vandellii, avec : Drave des frimas, Koelérie du Mont Cenis (Koeleria cenisia), Violette des Alpes de Valdieri (Viola valderia), Saxifrage rude (Saxifraga aspera), Agrostide des Alpes (Agrostis alpina), Pâturin des bois (Poa nemoralis), Saxifrage sillonnée (Saxifraga exarata), Joubarbe des montagnes (Sempervivum montanum).

Physionomie, structure

Le degré de recouvrement est inférieur à 10 % ; d’ordre général, celui-ci est plus fort aux altitudes inférieures et aux expositions froides en raison de conditions microclimatiques plus clémentes (sécheresse moins intense).
La végétation est essentiellement composée d’hémicryptophytes et de chaméphytes. Avec l’élévation en altitude, les hémicryptophytes deviennent prépondérants par rapport aux chaméphytes et la végétation présente un caractère de plus en plus xérophile.
Présence de nanophanérophytes, principalement aux altitudes inférieures : Amélanchier (Amelanchier ovalis subsp. ovalis), Cotonéaster du Jura (Cotoneaster juranus), Cotonéaster à sépales obtus (Cotoneaster obtusisepalus), Genévrier nain (Juniperus sibirica). Les géophytes sont quasiment inexistants et ne pourront se développer qu’au niveau de larges fissures.
Parmi les espèces végétales se développant sur ces milieux figurent des chasmophytes stricts, avec notamment : Raiponce de Charmeil, Potentille à tiges courtes, Primevère marginée, Saxifrage fausse diapensie, Saxifrage bleuâtre (Saxifraga caesia)…, des lithophytes avec : Nerprun nain (Rhamnus pumilus), Globulaire à feuilles en cœur (Globularia cordifolia)…, auxquelles il faut ajouter des espèces issues d’éboulis et de pelouses rocailleuses : Laîche des rochers (Carex rupestris), Campanule à feuilles de cranson (Campanula cochleariifolia).
Les lithophytes (Nerprun nain, Globulaire à feuilles en cœur) jouent un rôle édificateur en favorisant l’accumulation de terre fine, contrairement à beaucoup de chasmophytes stricts (les Saxifrages à feuilles à pores crustacés, la Potentille à tiges courtes…) dont le développement en coussin ne leur permet pas de retenir les particules minérales et organiques.

Confusions possibles

Falaises calcaires du Saxifragion lingulatae [Code UE : 8210, Code Corine : 62.13], dans les Alpes-Maritimes, les Alpes-de-Haute-Provence.
Falaises rocheuses calcaires, des situations ombragées, fraîches du Cystopteridion fragilis [Code UE : 8110, Code Corine : 62.152] présentant une plus grande importance de mousses, de lichens et de fougères.

Dynamique

La plupart des espèces citées possèdent la faculté de s’installer dans les fentes comme pionniers dès que l’humus noir (apport par les eaux de ruissellements, le vent…) accumulé est suffisant pour permettre la germination de plantules.
Cet habitat présente un caractère permanent.

Habitats associés ou en contact

Sur vires, replats :
- pelouses méso-xérophiles du Seslerion caeruleae [Code UE : 6170, Code Corine : 36.43] sur substrat calcaire ;
- pelouses thermophiles à Fétuque acuminée (Festuca acuminata) et Potentille des Alpes de Valdieri (Potentilla valderia) [Festuco acuminatae-Potentilletum valderiae ; Code Corine : 36.333] sur substrat gréseux ;
- pelouses pionnières de l’Alysso alyssoidis-Sedion albi [Code UE : 6110*, Code Corine : 34.11].
Au pied de la falaise ou en position sommitale : hêtraie à Calament à grandes fleurs (Calamintha grandiflora) [Code Corine : 41.16], pelouses méso-hygrophiles du Caricion ferrugineae [Code UE : 6170, Code Corine : 36.41] dans les parties stabilisées fraîches à l’étage subalpin.
Au pied de la falaise : éboulis calcaires à éléments moyens à Tabouret à feuilles rondes (Noccaea rotundifolia) [Thlaspietum rotundifolii ; Code UE : 8120, Code Corine : 61.22], à éléments fins à Bérardie laineuse (Berardia subacaulis) [Berardietum lanuginosae ; Code UE : 8120, Code Corine : 61.2322], à Liondent des montagnes (Leontodon montanus) [Leontodondetum montani ; Code UE : 8120, Code Corine : 61.2321] ; aux expositions nord, éboulis calcaires longuement enneigés de l’Arabidion caeruleae [Code UE : 8120, Code Corine : 61.2].
Dans les Alpes-Maritimes contact à l’étage subalpin ou alpin inférieur avec les falaises calcaires du Saxifragion lingulatae [Code UE : 8210, Code Corine : 62.13].

Répartition géographique

Cet habitat est répandu dans l’ensemble des Alpes. Les différentes associations occupent des aires plus restreintes :
- falaises à Raiponce de Charmeil et Buplèvre des rochers : partie méridionale des Alpes cottiennes (Alpes-de-Haute-Provence), hautes vallées du Var et de la Tinée (extrémité occidentale des Alpes-Maritimes) ; la limite occidentale se situe approximativement au niveau du Haut-Verdon ;
- falaises à Avoine à feuilles fines et Buplèvre des rochers : Préalpes du Dauphiné (Valentinois méridional, Dévoluy, Vercors méridional) ;
- falaises à Potentille luisante et Millepertuis nummulaire : massif de la Grande Chartreuse ;
- falaises à Androsace de Suisse : Alpes du Nord ;
- falaises à Primevère marginée et Valériane saliunca : Alpes du Sud (Ubaye, Briançonnais, Queyras…) ;
- forme sur grès d’Annot : décrite dans la partie nord-ouest de la partie supérieure du bassin de la Haute Tinée.
À rechercher ailleurs.

Valeur écologique et biologique

Cet habitat présente des espèces endémiques des Alpes : Androsace de Suisse, Avoine à feuilles fines, Globulaire à feuilles en cœur, Buplèvre des rochers, Primevère marginée, Saxifrage bleuâtre, Saxifrage vaudoise, Genépi des glaciers, Saxifrage fausse diapensie…
Cinq espèces sont protégées au niveau national : Primevère marginée, Androsace de Suisse, Androsace pubescente, Oreille d’ours, Saxifrage vaudoise.
Deux espèces sont protégées au niveau régional (Provence- Alpes-Côte d’Azur) : Androsace pubescente, Saxifrage fausse diapensie.
Deux espèces sont inscrites au Livre rouge national (tome I) : Saxifrage vaudoise, Potentille luisante.

États de conservation

États à privilégier :
Falaises exemptes de toutes activités humaines.

Tendances et menaces

Cet habitat est globalement non menacé bien que de plus en plus fréquenté (multiplication des via ferrata).
L’exploitation de la roche peut ponctuellement menacer cet habitat.
L’équipement des voies d’escalade et de via ferrata (avec le nettoyage de la falaise qu’elle implique), la création d’écoles d’escalade ainsi que leur fréquentation intensive peuvent ponctuellement constituer des facteurs de raréfaction de certaines espèces végétales.
Le dérangement répété des sites de reproduction d’espèces animales rupestres peut entraîner leur abandon, en particulier pour les espèces de grands rapaces rupicoles comme : l’Aigle royal, le Grand-duc d’Europe, le Faucon pèlerin et le Gypaète barbu, et certaines espèces de chauves-souris comme le Molosse de Cestoni (Tadarida teniotis) souvent présent au sein des colonies de Martinet alpin (Apus melba).

Axes de recherche

Mise en place de suivi de la reconquête de la végétation sur les surfaces mises à nu suite à des aménagements.
Mise en place de suivi des aires de nidification des espèces animales rupestres.

Fiche du cahier d'habitats (format pdf)
Bibliographie

 Bensettiti F., Herard-Logereau K., Van Es J. & Balmain C. (coord.), 2004. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 5 - Habitats rocheux. MEDD/MAAPAR/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 381 p. + cédérom. (Source)